CinemaCon 2016 – La multiplication des expériences cinématographiques (3)

Que signifie aujourd'hui aller au cinéma ? La présentation de David Hancock, responsable des analyses du marché cinématographique pour l'institut IHS, a montré que si elle reste encore ancrée, la représentation traditionnelle de la sortie en salle est en train d'éclater. Il n'y a plus, une mais de multiples façons d'aller au cinéma, du fait de la diversification croissante de l'offre des salles. Troisième volet de notre série d’articles consacrée aux conférences et exposés de l'International Day, la journée inaugurale de CinemaCon2016.
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L’offre de programmes s’élargit : le film n’est plus obligatoirement l’objet ultime de la sortie. Ca peut être un documentaire, du cinéma événementiel, des jeux sur grand écran (ce qu’on appelle les esports)…

Les concepts de salles se multiplient : salles de luxe (fauteuil « première classe » avec boisson et nourriture éventuellement servies à la place); formats de projection spéciaux (Imax, cinéma à 270°…).

D’autres concepts rencontrent un succès plus limité, mais durable, dans des pays comme la Grande-Bretagne notamment : les salles pop up (cinémas éphémères dans des lieux inattendus : entrepôts, parkings…); le « secret cinema » (une sorte de déclinaison du Rocky Horror Picture Show pour d’autres films cultes). Les formats d’image et de son sont de plus en plus nombreux : 3D, HDR, laser, son immersif… Enfin, la sortie cinéma répond à des motivations de plus en plus variées grâce à internet (réservation en ligne, réseaux sociaux, sites spécialisés, géolocalisation…).

Les exploitants de salles doivent-ils prendre le train de cette diversification ?

CGV, l’un des principaux exploitants asiatiques (il est présent en Corée, en Chine, au Vietnam, aux USA et, depuis peu, en Turquie à la suite du rachat de Mars, le principal circuit national) a clairement pris cette direction. Certains de ses cinémas rebaptisés « Cultureplex » proposent des programmes aussi éclectiques (films, concerts, esports…) que les plats servis aux spectateurs pendant les séances (Korean barbecue, cuisine française…).

Les Cultureplex de CGV déclinent la culture au sens large : dotés d’une bibliothèque (avec de vrais livres) et équipés pour accueillir des séminaires, ils proposent parallèlement du cinéma 4D (fauteuils mobiles et vibrants pour accompagner les films d’action) et du cinéma panoramique (triptyque d’écrans permettant de projeter des images à 270°). Il faut noter que les solutions 4D et 270° sont fournies par la maison mère de CGV (CJ CGV). Le circuit de salles sert donc aussi de vitrine pour promouvoir ces technologies.

Cette conception audacieuse de l’offre cinématographique est certainement moins risquée pour un circuit encore jeune (CGV a été créé en 1995), opérant sur des territoires où la fréquentation est en plein essor, que pour un exploitant « mûr » et actif sur des marchés saturés.

Le dirigeant du circuit anglais Picturehouse, qui intervenait à CinemaCon aux côtés de celui de CGV dans un débat intitulé « La globalisation et le monde du Cultureplex », a exprimé son point de vue sur la diversification de l’offre des salles. « Il faut que la famille Johnson [l’équivalent de nos Dupont(d)] puisse continuer à aller au cinéma en famille, a-t-il déclaré en substance. On détruit les fondements de la sortie en salles si on se met à segmenter le public et à proposer à chaque membre de la famille une séance différente ». À méditer.