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Julien Biard, étalonneur chez Carbon, Chicago

D’origine française, Julien Biard a rejoint la compagnie Carbon à Chicago en juillet 2018 après avoir développé son expertise de l’étalonnage chez MPC et Finish/Freefolk à Londres. Il a également gagné de nombreux prix dans le domaine de la couleur, tout en collaborant avec des réalisateurs tels que Filip Engstrom, Crowns & Owls et Thomas Bryant. Dans cette interview, Julien partage avec nous son parcours professionnel.
Crowns & Owls - Réalisateur : Alex Gardener - Client : Hunger Magazine - Étalonneur : Julien Biard © DR

Moovee : Qu’est-ce qui vous a amené au monde de la couleur ?

Julien Biard : J’ai étudié l’ingénierie, plus particulièrement l’ingénierie textile, avant de travailler à Madagascar pendant trois ans après l’obtention de mon diplôme d’ingénieur. Je passais la plupart de mon temps dans des laboratoires à créer des motifs et des couleurs, de manière organique ou artificielle. La partie couleur de cette activité m’a permis de parcourir l’île de manière intensive, ainsi qu’une grande partie de l’Afrique de l’Est, afin de trouver des éléments bruts pour concevoir ces couleurs. En termes de transition, j’ai ensuite quitté les laboratoires et concentré mes études sur le développement des couleurs sur le terrain.

Lorsque j’ai quitté l’océan Indien, j’avais besoin d’un nouveau défi et je suis parti à Londres. J’avais un réel désir d’apprendre l’anglais, une langue que je n’avais jamais vraiment apprise lors de mes études, ce qui me frustrait depuis un certain temps. Après quelques mois passés à faire la fête et m’immerger dans la culture anglaise, j’ai trouvé un emploi d’assistant dans une maison de postproduction à Soho. Là, j’ai rencontré l’étalonneur Graeme Hayes qui, au fil des années, a partagé ses connaissances et sa passion pour cette discipline avec moi. Je suis devenu son assistant et je suis tout simplement tombé amoureux de ce métier.

 

Pourquoi appréciez-vous autant la couleur ?

Julien Biard : La partie couleur en postproduction me procure une grande satisfaction, en particulier la réaction des personnes une fois le travail accompli. Créer une atmosphère et un ressenti à partir d’une image blême et lui donner vie est un sentiment très satisfaisant.

 

Comment continuez-vous à apprendre votre métier ?

Julien Biard : Les technologies évoluent et changent constamment, parfois pour le meilleur et parfois pour le pire. Travailler sur films me manque énormément, mais le workflow linéaire, par exemple, ne me manque pas. Le meilleur moyen, selon moi, de rester au courant des nouveautés en matière d’étalonnage, consiste à expérimenter de nouveaux outils et de nouvelles techniques et s’informer. Se contraindre à aborder le métier de manière différente, expérimenter en permanence et ne jamais tomber dans la routine, c’est comme ça que j’apprends.

Puisque je passe la majeure partie de ma journée dans le noir, je passe le plus de temps possible dehors : à faire du vélo, de la randonnée et à prendre des photos… J’observe les environs et ça me donne des idées. Je pense à la manière dont je pourrai recréer ces couleurs qui m’entourent.

 

Où vous placez-vous par rapport au département VFX ?

Julien Biard : Le workflow linéaire nous séparait plus ou moins à une époque, mais nous sommes maintenant beaucoup plus dans la collaboration et capables de partager nos idées sur les mêmes bases et de manière transparente. Nous sommes beaucoup plus flexibles et nos disciplines se rejoignent de plus en plus. Je pense que cela permet une application créative beaucoup plus vaste.

 

Vous avez été étalonneur à Londres et maintenant à Chicago. Votre travail a-t-il changé entre ces deux villes ?

Julien Biard : Bien que le travail reste à peu près le même, la principale différence que j’ai constatée réside dans le niveau de participation du réalisateur et du chef op au sein du procédé d’étalonnage. Aux États-Unis par exemple, les sessions sont la plupart du temps dirigées par les agences, et les réalisateurs travaillent plus à distance, contrairement à Londres où ils sont à mes côtés la plupart du temps.

 

Les étalonneurs aujourd’hui ne se contentent plus de rester assis dans une pièce sombre en postproduction. Comment voyez-vous votre rôle évoluer ?

Julien Biard : Les différents workflows et les différents maillons de la chaîne sont plus vastes qu’ils ne l’étaient auparavant. Je pense donc que les commentaires et les conseils de l’étalonneur sont plus pris en considération qu’auparavant. Tous les différents créatifs doivent travailler ensemble afin d’obtenir le meilleur résultat. Pour autant, je travaille toujours dans une salle obscure.

 

Quelle est votre approche lorsque vous étalonnez différents genres : publicités, clips vidéo, films, projets pour la télévision, etc. ?

Julien Biard : Peu importe le genre, pour moi le métier reste le même. J’interprète et traduis au mieux le désir du client, je l’applique à l’image et je lui donne le meilleur look possible. Certains projets peuvent être axés davantage sur le produit, tandis que d’autres sont davantage axés sur la narration et l’histoire. En fin de compte, l’idée reste la même : créer de belles images !

 

Y a-t-il des projets en particulier qui vous ont marqué dans votre carrière ?

Julien Biard : The Great British Bake Off pour la BBC était mon premier vrai étalonnage. J’ai vraiment apprécié cette expérience et cela m’a appris à étalonner de manière méthodique et rapide. Travailler avec l’équipe de Crowns & Owls a également été un moment fort de ma carrière. Nous partagions les mêmes idées et étions prêts à expérimenter différentes choses. Nous travaillions dans l’instant en dépit des deadlines. Nos idées étaient audacieuses et différentes de la norme. On ratait parfois, puis on recommençait encore et encore pour finalement aboutir. Ce fut l’une de mes meilleures expériences en postproduction. Cela continue, car nous sommes devenus par la suite de très proches amis.

 

Pouvez-vous élaborer sur un de vos projets les plus récents et ses challenges ?

J.B. : Encore une fois, je pense que le principal défi consiste à faire en sorte que tous les départements travaillent ensemble main dans la main. Aujourd’hui, c’est beaucoup plus simple grâce à Baselight. Sa flexibilité et sa puissance permettent un étalonnage facile quel que soit le support ou le format. Quant aux outils, j’adore Base Grade qui est sorti avec la version 5 du logiciel ainsi que la fonction du Tracking – qui s’améliore constamment à chaque mise à jour. L’outil de Blending est toujours génial, tandis que le Curve Grade continue d’être aussi indispensable.

 

Selon vous, quel est le plus de Baselight ?

J.B. : Pour moi, en tant qu’artiste, la meilleure chose à propos de Baselight mis à part son look et ses performances, est le soutien et la proximité que nous recevons de la part de l’équipe FilmLight. Il y a toujours quelqu’un chez FilmLight, quel que soit le pays ou le fuseau horaire, pour répondre à vos questions et vous aider. La deuxième meilleure chose est sa flexibilité et sa rapidité d’exécution. J’ai trouvé le logiciel vraiment intuitif, puissant et très facile à utiliser.

 

Que rêvez-vous de réaliser d’ici la fin de votre carrière ?

J.B. : Acheter mon voilier de 30 mètres et partir à la recherche du meilleur rhum des Caraïbes. En attendant, j’aimerais passer progressivement à l’étalonnage de films. J’aimerais également former le plus de personnes possible, car je pense que le partage des connaissances et de l’expérience rendra notre industrie plus forte et notre métier plus durable.

 

Quelle est la prochaine étape pour vous et votre compagnie ?

J.B. : Mon objectif est maintenant d’exceller chez Carbon et de créer un lieu de référence pour l’étalonnage dans le Midwest et à l’échelle nationale. Faire du bon travail et remporter le plus de prix possible, tout en continuant à m’amuser !

 

Article paru pour la première fois dans Moovee #2, p.12/14. Abonnez-vous à Moovee (6 numéros/an) pour accéder, dès leur sortie, à nos articles dans leur intégralité.