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Dossier : la french touch du zapping

La TV connectée a une histoire déjà riche de « success stories » dans l’hexagone, où quelques spécialistes de ce marché prospèrent, en dépit du fait que le monde a changé et que les géants de l’informatique comme Google profitent de la convergence des technologies web et TV connectée pour pénétrer ce marché. Reportage chez trois champions français des interfaces de navigation et du middleware.
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Né au milieu des années 90, Netgem fait partie des précurseurs de la TV connectée. Cela ne l’empêche pas de continuer à innover par itérations successives de sa plateforme propriétaire au gré de ces nouveaux clients en France ou à l’étranger. À l’automne 2014, il était, par exemple, à l’origine de la nouvelle offre Everytime Everywhere TV (EE-TV) de l’opérateur de télécommunication britannique EE. Cette nouvelle offre EE-TV est très riche puisqu’elle comprend de la TV numérique, de la TV connectée et des services OTT. Elle repose en particulier sur une Set-top-box très haut de gamme fournie gratuitement dans l’abonnement qui a été conçue par Netgem. Cette Set-top-box est équipée d’un port Ethernet Gigabit, de quatre tuners TVHD (DVB-T2) et d’un disque dur pouvant enregistrer jusqu’à 1 Téraoctet de vidéos.

Mais le plus intéressant dans ce projet tient au module de zapping dans les programmes et à la douzaine de services en HTML5 qu’a développés Netgem et à l’intérieur desquels chaque utilisateur navigue avec la même ergonomie que ce soit via la télécommande du décodeur TV ou l’écran tactile de la tablette. Ce contrôle partout identique est rendu possible par le fait que Netgem propose une interface de navigation centrée sur la navigation par l’image. Comme le souligne Stephan Crainic, Responsable technique de la plateforme chez Netgem/Videofutur : « Avec la généralisation des tablettes et l’introduction récente du HTML5 dans les décodeurs TV, la navigation est centrée sur scrolling dans les images vers la droite ou la gauche en haut et en bas à l’aide d’une seule touche de sa télécommande ou de son doigt si l’on utilise une tablette. L’usage des touches de couleur de sa télécommande pour naviguer dans des menus disparait peu à peu. Chez Netgem, nous avons senti ce virage s’amorcer il y a trois déjà quand Vidéo Futur a introduit Windows 8 et ses fameuses tuiles dans son offre de services ».

Cette harmonisation de la navigation au sein des interfaces de TV connectée ne va pas de soi cependant et nécessite une solide maîtrise de la programmation informatique et du middleware des décodeurs. De ce point de vue, chez Netgem, on intègre depuis toujours de manière verticale les tâches. Et il n’y a guère que la fabrication du décodeur qui est sous-traitée à l’étranger. « Pour le moment en tout cas, insiste Stephan Crainic, cela nous permet de rendre la plus fluide possible l’expérience de nos utilisateurs quel que soit le terminal utilisé ». Pour autant, Netgem reconnait volontiers l’intérêt des systèmes Android avec l’expérience similaire qu’ils procurent quel que soit le device. « Mais, là encore, il faut être en mesure de connaître parfaitement les spécifications des différentes versions d’Android afin de le faire tourner sur une configuration matérielle adéquate ».

 

Un moteur de TV connecté open source, performant et… Français

L’intégration verticale de l’ensemble des composants de la TV connectée n’est pas la voie empruntée par Wyplay. Cet autre acteur français de la TV connectée, lancé en 2006, n’en est pas moins devenu incontournable au niveau international grâce à un pari osé. Jusqu’au début de l’année 2014, Wyplay déployait en effet assez classiquement des services de TV connectée complets avec de belles références comme SFR, Vodafone ou Belgacom. Il s’appuyait, pour ce faire, sur un middleware « maison », baptisé Frog, qu’il décide cependant, il y a un peu plus d’un an, de mettre à la disposition d’une large communauté de développeurs… en open source. Le modèle économique de Wyplay s’en trouve-t-il fragilisé ? Pas du tout, l’expansion internationale de Wyplay et son niveau de prestation s’en trouvent démultipliés via plus de 80 partenaires industriels au travers de la planète parmi lesquels des fabricants de décodeurs, des opérateurs de chaînes, des éditeurs logiciels… Et, surtout, des références de choix comme Canal+ en France adoptent Frog et poussent toujours plus haut les performances de ce middleware.

 

Canal+, le cas client de référence

Canal + s’est appuyé sur Frog pour mettre à jour, en 2014, l’ensemble de son parc de décodeurs numériques terrestres tandis que les décodeurs satellite du groupe seront remplacés de la même manière en 2015. Grâce à ce middleware agnostique au type de décodeur utilisé, Canal Plus mélange, via un unique décodeur et en toute transparence sur le plan du zapping, les canaux numériques terrestres avec la réception de quelque 200 chaînes en clair accessibles en mode Over The Top (l’OTT consiste à recevoir des chaînes en ADSL indépendamment de son fournisseur d’accès TV ADSL). À l’intérieur du plan de services de Canal+ l’utilisateur peut, dès lors, zapper d’une chaîne OTT à une chaîne DVB-T sans latence, en ayant juste parfois une baisse de qualité liée aux fluctuations du débit ADSL et à l’adaptation de la qualité du streaming qui s’en suit.

Dominique Feral, le Directeur Marketing de Wyplay, précise : « Aujourd’hui, l’encodage en streaming adaptatif et la qualité du réseau ADSL dans la plupart des zones urbaines permettent réellement d’avoir une continuité de services entre l’OTT et le reste de la télévision. En outre, les décodeurs TV évoluent eux-mêmes en termes de performances avec des guides de programmes en HD basés sur la souplesse des graphismes permis par le HTML5 et des temps de zapping en ADSL nettement optimisés ».

 

L’open source va ouvrir de nouveaux marchés à la TV connectée

Aujourd’hui, attiré par la liberté qu’il offre sans pour autant faire de compromis sur la qualité ou les prix, Frog remporte un vif succès auprès des opérateurs de TV connectée, dits de Tiers 1, qui évoluent dans le monde de la télévision. Mais Wyplay, qui compte près de 200 personnes, dont les trois quarts sont ingénieurs ou développeurs, ne compte pas en rester là. Des contrats sont à venir en Inde et en Asie du Sud-Est, mais surtout Wyplay veut mettre Frog à la portée des « Systèmes intégrateurs ». Ces derniers sont des sociétés de prestation capables de gérer les ressources logicielles et matérielles et de customiser des services de TV connectée à destination de marchés de niche comme les Hôpitaux, les réseaux privés d’entreprise, les hôtels… Dans ce cadre, le fait que Wyplay ne perçoive plus de revenus liés aux services de customisation laisse une marge bénéficiaire plus importante pour les « Systèmes intégrateurs » qui risquent d’en profiter dans les mois à venir pour ouvrir de nouveaux marchés. À n’en pas douter, la French Touch de la TV connectée n’a pas fini de faire parler d’elle…

 

Wiztivi, leader français du framework applicatif

Dans l’univers de la TV connectée, un autre acteur français est en train de faire une remarquable percée à l’international. Il s’agit de Wiztivi, start-up créée à Nantes en 2009 et qui a connu, ces quatre dernières années, une croissance de son CA de l’ordre de 1 800 %, ce qui la classe au trentième rang européen du dernier palmarès européen Deloitte & Touche des 500 start-ups les plus prometteuses. 

Selon Eric Bibolet, co-fondateur de Wiztivi, sa société se distingue de ses concurrents en premier lieu : « par la prise en considération les différents états d’activité d’un téléspectateur, avec plusieurs niveaux d’interactivité de la plus passive, où le contenu arrive en mode push avec un flot de recommandations (NDLR : Wiztivi s’interface avec les moteurs de recommandation de deux sociétés françaises Spideo.tv et Cognik.net), jusqu’à un niveau d’interactivité plus actif où l’on sollicite l’engagement de l’utilisateur ».

Guillaume Mur, le responsable du studio de création de Wiztivi, va plus loin : « À force de travailler sur les ergonomies de la TV connectée, nous avons la certitude que l’EPG n’est plus la bonne voie. La tendance est désormais à pousser un contenu répondant aux besoins des utilisateurs via des outils de recommandation. L’interface utilisateur doit être invisible la plupart du temps et n’apparaître que lorsque le téléspectateur actionne sa télécommande. Il commence alors a voir des flèches gauche-droite discrètement en surcouche de la vidéo et ce n’est qu’à partir de là qu’il prend conscience des fonctions interactives et des informations associées au programme qu’il regarde. Sur le plan cognitif, nous sommes aussi très proches d’un principe de cartographie nord-sud/est-ouest très vite compris par le cerveau humain ».

Cette recherche graphique et ergonomique poussée, Wiztivi la décline aujourd’hui autour de plusieurs formules d’interfaces de navigation : le produit Timeless 180 qui repose sur des fonctions accessibles de manière horizontale, Timeless 90 via une forme de navigation verticale et Timeless 4K qui divise l’écran TV UHD en 4 animations graphiques Live en Haute Définition.

 

Des applications compatibles partout

Mais le savoir-faire de Wiztivi va au-delà du simple design numérique. Wiztivi dispose d’une solide expertise technique en interne qui lui permet de proposer, au travers des Master UI, de véritables bouquets TV connectée complets qui intègrent des fonctionnalités de base incontournables comme le zapping des chaînes, la gestion de leur positionnement, l’enregistrement des émissions, le reset de la Set-top-box, le contrôle parental, la sécurité des contenus, la mise en place d’un catalogue de VàD, l’intégration de la catch-up TV, l’ajout d’applications tierces…

De même, sur le moindre projet d’application TV, le studio de création de Wiztivi travaille en étroite collaboration avec la cellule de développement qui fixe constamment les contraintes techniques liées aux box. C’est d’ailleurs le point fort de Wiztivi, qui dispose depuis toujours d’une solide cellule projet et développement comprenant plusieurs dizaines de spécialistes du HTML5 et le Javascript qui ont conçu au fil du temps, sous la houlette de Manuel Dujardin, Directeur R&D, un framework applicatif capable d’être porté sur n’importe quelle plateforme de TV connectée dans le monde (une trentaine de terminaux TV d’opérateurs différents). Cette capacité de portage multiplateforme a permis à des éditeurs de services comme Daylimotion ou Allociné de se développer rapidement à l’international sur les TV connectées. Selon Manuel Dujardin : « les opérateurs y gagnent du temps et de l’argent sur le déploiement des nouveaux services. Là où auparavant il fallait plusieurs mois à un éditeur ne serait-ce que pour changer un logo à cause du code natif de chaque plateforme, aujourd’hui avec ce framework la mise à jour d’une interface complète s’effectue en quelques semaines ».

L’autre force de Wiztivi, de ce point de vue, est d’avoir intégré depuis plusieurs années déjà une plateforme de tests de tous les nouveaux terminaux de TV connectée, ce qui lui offre même parfois l’opportunité de suggérer certaines améliorations aux fabricants de téléviseurs ou de décodeurs. Cette déjà longue expérience des technologies web (HTML5, CSS ou javascript) lui permet, entre autres, de proposer à ses clients le meilleur chemin de développement informatique en vue d’optimiser l’affichage des applications sur tel ou tel modèle de décodeur, mais aussi depuis quelque temps sur les écrans compagnons, domaine dans lequel Wiztivi a entamé sa diversification.

 


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