Régies flight de FTV – Les AK-PLV100 « Powered by Varicam » annoncent la couleur

La caméra Super 35 de Panasonic AK-PLV100, à l’ergonomie de caméra de plateau, a été choisie par France Télévisions pour faire évoluer sa gamme de régies flight Modul’air, en partenariat avec Visual Impact France. Retour d’expérience sur ce nouvel outil avec Boris Salhaji, responsable des moyens légers chez France TV.
Dispositif Modul’Air pour la captation de « Vivantes » de Mickaël Le Mer au théâtre de Suresnes, dans le cadre de « Suresnes cité danse ». © DR

 

Modul’air, l’offre de moyens légers de France TV développée il y a quatre ans, se compose de plusieurs régies flight. La régie Unit’air est utilisée sur l’émission Boulevard de la Seine. La régie appelée Modul’air Montparnasse tourne l’émission quotidienne C’est ce soir. La régie Exp’air est dédiée au spectacle vivant et aux émissions exceptionnelles et la régie Stream’Air est une offre destinée à faire du live sur Twitch.

France TV dispose également d’un petit car D4, sans soufflet, équipé de sept caméras. « Une autre régie va bientôt voir le jour dans la continuité des projets de cars UM1et UM2. Pour l’instan,t son nom de code est UM3 », annonce Boris Salhaji. Récemment, la régie Exp’air a été dotée de huit caméras AK-PLV100, en partenariat avec Visual Impact France.

 

Pourquoi avoir remplacé les caméras de Modul’air ?

Boris Salhaji : Avant l’arrivée de la PLV100, la régie Modul’air était équipée de caméras Ursa Broadcast G2 de Blackmagic avec des télécommandes Cyanview. Les Ursa font une très belle image dès lors qu’on tourne en Log et en grand capteur, mais à France TV nous avons un usage broadcast exigeant et nous étions limités sur la connectivité et le pilotage des caméras. En multicaméras, nous avons des contraintes de temps qui exigent de se déployer très rapidement. Il nous fallait donc une ergonomie de caméra broadcast.

Nous avions fait déjà fait des essais avec des caméras typées cinéma comme la Varicam Panasonic ou des FX9 Sony mais la mise en œuvre fut complexe car il fallait ajouter à ces caméras tout un accastillage pour fonctionner en multicam : ajouter un module pour la fibre, gérer les « rouges » (Tally), motoriser les optiques (il manque souvent le « hirose 12 pin » qui permet de piloter l’optique), ajouter des moniteurs de contrôle et des retours pour les cadreurs.

Aussi, Modul’air fait beaucoup de spectacles vivants où il y a une attention toute particulière portée sur l’image. Comme les pièces de théâtre sont des fictions en live, nous cherchons à nous rapprocher d’une image cinéma. Il nous est souvent demandé des grands capteurs et du Log car il y a de la postproduction et de l’étalonnage derrière.

 

Comment s’est fait le choix de la nouvelle caméra ?

Dans le passé, nous avions déjà équipé un car-régie de huit AK-UC4000 Panasonic (caméras 4K 2/3”). Or les CCU et télécommandes des UC4000 sont compatibles avec la PLV100. Le choix de la PLV100 nous a donc permis de réutiliser nos CCU et RCP existants. Les UC4000 en 2/3” sont encore utiles car certains tournages n’ont pas l’économie nécessaire pour tourner en grand capteur. Lorsqu’on filme du sport, c’est bien d’avoir un effet cinelook pour donner de l’émotion, mais pour les plans en longues focales nous sommes limités au 25-1 000 en PL. Lorsqu’on veut positionner un zoom 111x, nous prenons une UC4000 où nous ajoutons une bague d’adaptation à la PLV100. Au démarrage du CCU, nous pouvons choisir entre PLV100 et UC4000. Lorsque nous combinons ces deux caméras, nous sommes sur un workflow assez seamless.

 

La caméra AK-PLV100 de Panasonic : une tête Super 35 et une image cinéma Varicam dans un corps de caméra de plateau. Elle est ici équipée du zoom Canon 17-120 mm. © DR

Quels avantages tirez-vous de la PLV100 ?

La robustesse et les fonctionnalités de pilotage de la caméra. Avec la PLV100, nous sommes dans un dispositif broadcast, nous disposons de plusieurs retours vidéo, un confort de travail avec l’ergonomie du viseur (la fonction de focus assist notamment), et les valeurs de zoom et de point qui remontent dans la caméra. La fonctionnalité de double ISO et la sensibilité de la caméra dans les basses lumières sont très appréciables. Aussi la marque Panasonic et l’héritage Varicam comptent. La PLV100 est logotée Varicam et intègre la color science de la Varicam. C’est important pour nos clients et pour les directeurs photo. Concernant le réseau d’ordre, nous utilisons un système Clearcom. Les fonctions d’intercom sont bien intégrées à la caméra. Il est possible d’écouter à la fois le réalisateur et l’ingénieur vision, et de parler à l’un ou à l’autre.

 

Quelles optiques utilisez-vous avec vos PLV100 ?

Nous louons les gammes Cine-Servo de Canon et Cabrio et Duvo de Fujinon. Comme les optiques ne sont jamais les mêmes en fonction des besoins, nous n’avons pas pour le moment investi dans un parc d’optique. En longue focale, il y a les zooms 50-1 000 mm chez Canon et 25-1 000 mm chez Fujinon, et nous avons hâte de tester la nouvelle Duvo 24-300 mm. La Duvo 25-1 000 de Fuji présente l’avantage d’être une « box lens » avec des lentilles larges, commandes intégrées, stabilisation de grande qualité, etc. Le 50-1 000 de Canon présente l’intérêt d’être moins encombrant. Il nous arrive d’utiliser des optiques 2/3” sur la PLV100 avec des bagues d’adaptation PL vers B4 de Arri ou IBE. Nous pourrions simplement mettre une UC4000 mais parfois il y a des a priori négatifs sur le fait que les capteurs 2/3” n’auront pas le même rendu que le grand capteur. C’est parfois peu justifié car en très longue focale on ressent moins l’effet 2/3”.

 

Quels sont les workflows couleur utilisés avec ces caméras ?

Il y a plusieurs workflows possibles. Nous sommes capables de faire de la double production HDR et SDR. Nous pouvons également faire une diffusion live en 709 et un enregistrement en Rec 2020 pour une diffusion ultérieure éventuelle ou pour sa valeur patrimoniale. Les captations de spectacles vivants ne sont généralement pas diffusées en live et les images partent en postproduction et en étalonnage. On va donc tourner en Log dans le PLV100, puis utiliser une LUT pour la visualisation avec des moniteurs Sony X1800 ou X2400. La LUT est implémentée grâce à une fonctionnalité du moniteur et nous pouvons switcher entre une visu avec ou sans LUT.

Les captations de spectacles se font généralement sur deux jours (deux représentations). Le premier jour est souvent une sorte de répétition sur laquelle on va récupérer des plans de coupe, et nous gardons plutôt la deuxième captation. Donc nous donnons des morceaux de rushes de la première journée au directeur photo qui va travailler chez lui sur une LUT pour le lendemain.

Ce qui nous manque aujourd’hui c’est la possibilité de faire du live grading dans la caméra : travailler une LUT en temps réel depuis une télécommande (comme sur une Varicam) et avoir en sortie de la caméra un signal Log et un signal graded. Nous sommes très en attente de cette fonction. Après les JO France 2 passera en tout UHD et HDR et donc on pourra diffuser en natif en UHD/HDR. C’est d’ailleurs en train d’être fait, ça peut être vu sur le canal 52 en région parisienne.

Sur Exp’Air, les sorties de CCU entrent dans des mélangeurs Atem Constellation de Blackmagic, mais nous allons bientôt changer pour un workflow encore plus intégré et ce sera annoncé bientôt par France TV [ndlr, l’Ultrix FR5 de Ross déjà opérationnel dans la régie flight et qui supporte les cartes Carbonite et Acuity semble être un bon candidat].

 

Les télécommandes AK-HRP1015 de Panasonic peuvent piloter aussi bien les caméras AK-PLV100 en Super 35 que les AK-UC4000 en 2/3”. © DR

 

À l’usage, y a-t-il d’autres fonctionnalités particulièrement intéressantes ?

Au-delà de la qualité d’image et de l’ergonomie, nous apprécions beaucoup la possibilité de connecter une télécommande en RJ45 directement sur la tête de caméra sans passer par le CCU. Sur les spectacles vivants, nous faisons des « prelight » ou « services lumière » et ce système permet au directeur photo d’utiliser une caméra en standalone (branchée sur secteur) pour faire ses réglages lumières. Ensuite il va reporter ses réglages et les rapporter à son ingénieur vision. Autre élément prometteur, la PLV100 a été conçue pour supporter le ST2110 dans le futur avec la possibilité de récupérer un flux ST2110 directement depuis la caméra. Ce qui veut dire que, à terme, la caméra pourra tourner sans CCU !

 

Les moyens légers sont-ils plus utilisés aujourd’hui que par le passé ?

Oui, les budgets se sont resserrés. Les moyens légers permettent de faire des captations sans rogner sur la qualité ou sur le nombre de caméras, mais dans des budgets plus restreints. Les contraintes de stationnement des véhicules et de pollution font que nous utilisons moins les cars. La mairie de Paris est très à cheval là-dessus. Il est de plus en plus difficile de bloquer les rues pour mettre un semi-remorque. Aussi, les groupes électrogènes qui tournent au pétrole sont mal vus.

Avec Modul’air, on se tourne vers l’écoprod : nous pouvons nous brancher sur l’énergie des lieux qui nous accueillent et travailler avec 4×16 A, là où un camion a besoin de 63 A, voire 2×63 A. Nos régies sont transportables dans deux camions de 20 m3 limités à 800 kg par camion, avec éventuellement un petit utilitaire en plus.

 

CARACTERISTIQUES DE LA AK-PLV100

La AK-PLV100 de Panasonic, mise sur le marché en 2023, est équipée d’une monture PL et d’un capteur Super 35 (17,25 Mpixels pour une résolution de 5,7K) à double ISO natifs pouvant délivrer un signal UHD (HDR/BT2020) et HD (Rec709). Son logo « Powered by Varicam » annonce la couleur. Pour le reste, son facteur de forme et son ergonomie sont ceux d’une caméra de plateau avec notamment des filtres neutres intégrés, des fonctions d’intercom, et surtout une fibre SMPTE standard qui permet de la connecter aux CCU et télécommandes Panasonic existantes. Dans le futur, un signal ST2110 non compressé ou en JPEG-XS sera délivré directement depuis la tête de cette caméra, sans CCU.

Article paru pour la première fois dans Mediakwest #56, pp 22-24