Les chiffres donnent le tournis : 9 000 nouveaux écrans ont ouvert en Chine en 2015. La fréquentation des salles y a bondi de 49 % en un an, le box office s’établissant à près de 7 milliards de dollars. À ce rythme, d’après l’institut IHS, la fréquentation des cinémas chinois dépassera celle des USA dans trois ans (2019).
Il ne manque « que » 7 000 écrans à la Chine pour dépasser le parc de salles américain et l’écart en nombre d’entrées – 1,161 milliard de tickets vendus aux USA contre 860 millions en Chine en 2015 – va se combler d’autant plus rapidement que la fréquentation des cinémas américains connaît une baisse tendancielle (-3 % par an en moyenne) depuis une dizaine d’années. Ce qu’on a d’ailleurs tendance à oublier, le box office continuant lui à progresser grâce à l’augmentation régulière du prix des places et à la majoration des tarifs pour les séances spéciales (relief…).
Avec cette montée en puissance de la Chine, les Américains et les Européens sont confrontés à un double défi : cinématographique et technologique.
Les producteurs et les distributeurs doivent multiplier les coproductions avec la Chine s’ils veulent profiter de l’essor de ce marché, non seulement en raison des quotas qu’impose l’État chinois (seulement 55 films étrangers ont pu être distribués en Chine en 2015), mais aussi parce que les films locaux sont de plus en plus performants. Leur part dans le box office a progressé de moitié en 2015 (+54% par rapport à 2014), contre « seulement » 25% pour les films étrangers.
La politique des quotas freine-t-elle les performances des productions américaines ou européennes ? Certainement, si la sortie du dernier Star Wars avait été autorisée en Chine en 2015 (le film n’y a été lancé que le 9 janvier dernier), la part des films étrangers aurait été sensiblement supérieure. Mais d’après Thomas Jegeus, président de Fox International Productions, le succès croissant des productions locales ne se limite pas à la Chine. Thomas Jegeus cite notamment l’exemple d’un autre territoire en pleine croissance, la Turquie, où l’an dernier deux films américains seulement ont figuré parmi les dix plus gros succès.
Fox veut multiplier les coproductions internationales, non seulement avec les pays cinématographiques émergents, mais aussi en Europe. Thomas Jegeus a ainsi rappelé l’extraordinaire succès d’Intouchables en 2011 et 2012, tant en France qu’à l’international.
Le défi technologique est lui aussi majeur : les prestataires d’équipements cinématographiques asiatiques profitent de l’essor du marché chinois et des pays environnants (Vietnam…) et leurs solutions sont de plus en plus performantes. GDC Technology, le fabricant de Hong Kong dont les serveurs équipent environ 40 000 écrans, en est l’illustration la plus marquante. Il est un partenaire clé de la solution de son immersif DTS:X considérée comme l’une des innovations majeures présentées cette année à CinemaCon (lire notre article ici).
C’est dans les salles asiatiques que DTS:X prend son essor : 80 des 100 premières salles qui ont été équipées sont localisées en Chine. Le marché du son 3D, sur lequel s’affrontaient jusqu’à présent un prestataire américain (Dolby Atmos) et un européen (Barco Auro 3D), voit naître un nouvel acteur de poids. DTS:X est certes de conception américaine, mais cette nouvelle solution de son immersif n’aurait peut-être pas vu le jour sans le partenariat entre DTS et GDC. Lequel lui ouvre un accès privilégié au marché asiatique, de loin le plus porteur actuellement pour le cinéma.