Le laser, la source de lumière du futur… Entretien avec Pedro Monsento de Barco

L’intégration de technologies inédites dans les projecteurs fait partie du développement des nouveaux projecteurs. Or, beaucoup de questions persistent à ce sujet. À la suite d’une conférence donnée par Cinemeccanica dans le cadre de la CST à Cannes, PEDRO MONSENTO, nouveau responsable de Barco pour l’Europe du Sud et la France, a répondu à nos questions relatives à l’usage du laser comme source de lumière dans les projecteurs du futur.
Barco_OK.jpg

 

Quelle différence y-a-t-il entre le laser phosphore et le RGB ?

Quand on parle de laser, il ne faut pas parler de différence. En fait, la seule chose dont on a besoin dans un projecteur, c’est de la lumière. On aurait pu le faire avec une bougie ou une lampe à pétrole, comme au temps de la lanterne magique. C’est la lampe au Xénon ou à mercure qui fut choisie ! Quand on utilise du laser, on doit faire de la lumière blanche ; or le laser est une lumière monochromatique, donc d’une seule couleur. Il faut donc arriver à les combiner pour faire une lumière blanche. Comme on est obligé, après avoir fait cette lumière blanche, de la séparer en trois couleurs fondamentales Rouge, Vert et Bleu il semble intéressant de produire directement cette lumière dans les trois couleurs fondamentales, et là, on a tout gagné ! Le laser RGB est donc plus efficace à ce niveau là, que d’autres types de laser car la finalité est de produire de la lumière.

Les deux technologies laser présentent des avantages et des inconvénients et des prix différents. Au niveau du laser, le fait de pouvoir générer un faisceau monochromatique permet de résoudre un problème qui existe encore en 3D et dont se plaignent certains spectateurs (phénomènes de rémanence ou d’apparition /disparition), problème que l’on peut résoudre avec un laser RGB et des lunettes spéciales, puisque le laser va générer six couleurs primaires, au lieu de trois, soit deux versions du Rouge, du Vert et du Bleu.

Barco a un modèle, le Flagship Laser RVB 6P, qui délivre ce type de signal ; pour chaque œil, il génère des fréquences très proches. Nous pouvons générer deux fréquences pour chacune des couleurs On ne peut pas faire cela facilement en partant d’une lumière blanche ; par contre avec un laser particulièrement bien aligné sur une fréquence, il suffit de les multiplier par deux et on obtient ces deux groupes de couleurs primaires.

 

Cela dit, la technologie phosphore est-elle moins chère ?

Oui, parce qu’on emploie moins de diodes laser. On part d’une diode et on utilise une couche de phosphore qui va générer les autres couleurs que l’on va recombiner en faisant du blanc. La technologie phosphore est celle qui est la plus proche du remplacement de la technologie Xénon car elle fait du blanc avec une technologie qui consomme moins de courant, qui est beaucoup plus stable dans le temps, qu’une lampe au Xénon dont la durée de vie est en dents de scie. À la moitié de sa vie, elle a déjà perdu 50% de sa luminosité !

En clair, le choix du laser est recommandé pour les exploitants. Tout nouveau projet doit démarrer sur une source laser car, économiquement et du point de vue de l’environnement, au niveau de la consommation et de l’évacuation de chaleur de l’air chaud, le laser s’impose. Après un certain nombre d’années, le surcoût de la source laser phosphore est largement amorti par l’économie effectuée.

En revanche, le Flagship RGB se distingue des autres technologies par la qualité d’affichage de l’image, aussi bien en 2D qu’en 3D, vérifiée par des tests comparatifs effectués auprès de spectateurs. Pour un exploitant, c’est un choix stratégique, au niveau de la qualité, mais c’est aussi la possibilité d’arriver à débaucher un spectateur. Les exploitants ont très peu de moyens pour fidéliser une clientèle. Or, avec le laser Flagship, ils attirent du monde, grâce à la qualité améliorée offerte par cette technologie, visible même par des non spécialistes. Allez voir le même film avec un Xénon, puis avec un laser phosphore et un laser RGB ! L’effet est garanti ! 

Barco est conscient que l’exploitant entre dans un monde qu’il ne connaissait pas auparavant. Un projecteur 35 mm bien entretenu pouvait durer 40 ans. Aujourd’hui, on est passé dans un monde qui ressemble à Windows, il faut faire des mises à jour, etc. Barco l’a compris et essaie d’être le plus conservatif possible, en essayant de faire le moins d’investissements qui ne soient pas pérennes. Aussi, Barco garantit 10 années ses lasers phosphore, ce qui protège la valeur de l’investissement. On a atteint un niveau de matériel que l’on peut placer et oublier, ce qui permet à l’exploitant de se concentrer sur les films qu’il programme, l’accueil, les prestations en nourriture et en boissons et la promotion qu’il fait pour son cinéma.

La révolution numérique a fait économiser de l’argent au distributeur, mais les exploitants ont été laissés pour compte. Aussi, Barco essaie-t-il de leur donner une avancée, une plus value qu’ils n’ont pas eue avant en participant à la réduction des coûts.

 

Comment vous positionnez-vous par rapport à Christie ?

Christie ou NEC ou Sony sont des firmes qui font d’excellents projecteurs, mais je ne veux pas faire de comparaison. C’est l’exploitant qui, en fonction de son cahier des charges (type de projection 2D ou 3D, type d’écran, emplacement et encombrement, etc.), fait son choix ! Barco a une très large gamme de projecteurs qui couvrent un grand nombre de possibilités répondant à différents besoins. Christie a choisi le RGB. Un exploitant a toujours un ticket de cinéma au même prix et Barco tient compte de cette contrainte avec sa gamme phosphore.

 

Peut-on passer facilement d’un appareil phosphore à un RGB ?

Non. Un exploitant doit prendre du phosphore pour ses petites salles et du RGB pour ses grandes salles premium ! Un exploitant, qui a acheté récemment un projecteur, a intérêt à acheter le kit phosphore (smart laser) pour remplacer son Xénon, même si son nouveau projecteur dure moins que l’ancien, car il peut récupérer la source de lumière et la mettre dans un autre projecteur lors du remplacement.

 

Les conditions de fonctionnement par rapport à la source laser sont-elles primordiales ?

Oui ! La température ambiante est importante, il faut qu’elle soit constante dans la pièce d’exploitation. Les systèmes phosphore ont deux systèmes de ventilation pour les maintenir à la bonne température. Néanmoins, celle de la pièce où ils sont implantés doit rester constante, car c’est ce qui détermine la durée de vie du système. Il est peu recommandable de faire des variations. Barco relève d’ailleurs ces paramètres à distance et en permanence pour avertir l’exploitant, via l’intégrateur, d’éventuels dysfonctionnements et assurer la garantie du système.

 

Quelle est la part de marché de Barco dans les cinémas ?

Nous sommes à 50 % si je ne m’abuse, mais cette part est amenée à beaucoup varier. Nous préférons parler de la part de capture, c’est-à-dire que nous acquérons énormément de nouveaux projets. Barco a une grosse part sur tous les nouveaux projets. Les autres constructeurs n’ont pas démérité, Christie a fait un choix de qualité et Barco s’est plus investi dans les problèmes d’exploitation. L’exploitant doit en retirer des bénéfices grâce aux spectacles alternatifs (en Live), à la publicité dynamique et le peu de projectionnistes pour exploiter le système. D’ailleurs, Barco développe des serveurs pour favoriser la projection de tous types de contenus vidéo. 

 

Comment la contribution numérique dite VPF (Virtual Print Fee = frais de copie virtuelles) pour aider les exploitants est-elle distribuée ?

Les distributeurs et studios ont imaginé un financement des projecteurs, basé sur l’économie réalisée sur l’absence de bobines de films. Ce financement est transmis aux exploitants, soit en direct à ceux qui ont signé un contrat avec les studios, soit via un intermédiaire qui peut acquérir le projecteur et le mettre à disposition de l’exploitant jusqu’à la fin du contrat VPF. En France, ce mécanisme a été avalisé par la loi du 30 septembre 2010.