Dimension 3, des conférences au service de l’image

Pour sa 6ème édition, le Forum Dimension 3, qui s'est déroulé du 13 au 15 juin 2012 à Saint Denis, a conforté sa place de 1ère plateforme européenne dédiée à la promotion des nouvelles technologies en accueillant une notamment série d'exclusivités...
bdc7d0f30e0c420b2ac279d6a1c096e4.jpg

Au menu, innovations technologiques, contraintes financières et tendances avec ici une présentation de quelques conférences à l’honneur.

La S3D a été mise à l’honneur il y a trois ans grâce au long métrage de James Cameron. Ainsi que le notait Kasimir Lehto, stéréographe et directeur photo (notamment sur Underworld 4), « il y a eu un effet Avatar qui a servi la 3D relief mais, ensuite, le soufflé est quelque peu retombé ». La faute, le plus souvent, en incombe à de nombreux blockbusters qui n’ont pris le virage relief qu’en postproduction avec, au final, le verdict de la salle, peu convaincue par cet argument marketing aux ficelles trop grosses.
C’est pour évaluer cela mais aussi dresser de nouvelles pistes créatives que les organisateurs de Dimension 3 Expo ont mis sur pied le Market Place, une plate-forme relationnelle qui favorise les contacts entre les producteurs et les acheteurs de programmes 3D. Autre direction prise, de façon intelligente, par Stephan Faudeux, commissaire de l’événement, la mise en place de conférences non plus uniquement centrées sur le long métrage mais également sur des secteurs concomitants, peut-être plus à même de redonner du souffle au marché.

La S3D pour la publicité

Certains studios comme CUBE Creative Computer Company (CUBE) avaient initié l’idée il y a quelques années : fort d’un nombre de films relief en augmentation, pourquoi ne pas créer une société de production de clips publicitaires (en animation) en relief ? Pas bête, sauf que, comme dit précédemment, la mayonnaise n’a pas pris.
Pour autant, la publicité demeure – en dépit d’une crise endémique – un véritable laboratoire des technologies. En outre, la S3D est en mesure de s’épanouir car elle se trouve mise au service d’une histoire… courte. C’est dans cette optique que la société 3D4COM met à disposition des entreprises un procédé unique de gestion de la 3D en temps réel et de diffusion d’images véritablement « jaillissantes ». Pourquoi adresser le marché de l’entreprise ? La réponse est triviale : « qui dit événement d’entreprise dit informations importantes à communiquer », explique Laurent Labrosse, président de 3D4COM. Du coup, cette information devient un spectacle à part entière avec une meilleure réceptivité du message.
James Stewart, réalisateur et producteur chez Geneva Films, apporte le point de vue nord-américain : « Les agences intègrent de plus en plus ce service auprès de leurs clients qui y voient une réelle plus-value et, surtout, un facteur différenciateur dans le « bruit » ambiant des campagnes qui envahissent quotidiennement notre espace. C’est un moyen à la fois intelligent et attractif de mettre en valeur un message et un produit ».
Outre la S3D, la réalité virtuelle est également un vecteur innovant pour réussir son lancement de produit. Le jeune Moulla, d’Augmented Magic, l’a bien compris et, depuis plusieurs années, avec une équipe de 30 personnes, il propose aux grands comptes une façon innovante de lancement de produits. Basé sur la réalité augmentée, Moulla réalise des tours de magie, intégrant sur un écran des interactions entre numérique et physique, scène et écran. L’Oréal et bien d’autres références font désormais appel à lui

Le Cloud, marketing ou paradigme ?

La dématérialisation des contenus est censée faciliter leur administration, gestion et stockage. Encore faut-il des liaisons très haut débit… et accepter une remise à plat de structures parfois solidement ancrées.
La première pierre d’achoppement demeure le financement. Avec la dématérialisation, la notion de pérennité est assurée mais quid de celle des ayants droit ? Le stockage, même numérique, a un coût et cette perte de préhension de l’œuvre pose questionnement.
Didier Debons, business development Directer chez Opex Media, évoque un « nouveau paradigme » : « En 2010, 60% des tournages se faisaient encore en argentique. En 2011, ce sont 70% des tournages qui se font désormais… en numérique. Il faut donc totalement repenser notre système ». C’est pourquoi Opex, opérateur de solutions Média à la demande, a mis sur pied une solution d’infrastructure et de services, en partenariat avec Neo Telecoms, second opérateur IP français. L’offre inclut un réseau international très haut débit et haute disponibilité, des datacenters multi-sites, une connectivité basée sur IP mais aussi fibre xDSL ainsi que des renderfarms en remote. Sur la S3D, OPEX propose un modèle « Pay per Use » s’articulant autour d’un plug-in pour 3ds Max permettant la gestion automatique des caméras relief dans une scène 3D, d’un logiciel de montage et de compositing/mastering 3D relief (3D-Tricks) et de 3D-Retouch, un outil pour la retouche des médias (avec mise en cohérence de la colorimétrie, géométrie et relief). Enfin, 3D-Play est un encodeur et player qui permet de lire les vidéos 3D sur n’importe quel écran du marché, en stéréoscopie comme en auto-stéréoscopie.
Adobe, représenté par Denis-Pierre Guidot, mise lui aussi sur le Cloud via une offre basée sur la dernière version de sa gamme Creative Suite ; pour une somme forfaitaire mensuelle, l’utilisateur peut désormais accéder à tous les outils de la CS6, en mode SaaS (Software As A Service) : idéal pour des productions limitées dans le temps, avec une capacité de stockage conséquente. À déconseiller tout de même sur le long terme…
Pour Didier Debons, « le cloud computing doit correspondre à un état de faits, soit la capacité, dans des métiers à géométrie variable, d’adapter les ressources en fonction des besoins. En ce sens, nous avons une offre complémentaire de celle d’Adobe ».

3D européenne : la difficile émancipation

À force de parler de nerf de la guerre, on en finit par… s’énerver. La conférence sur le thème « Y a-t-il une 3D européenne ? » était exemplaire des interrogations qui se font montre actuellement dans le secteur. Face à la déferlante nord-américaine, son homologue européenne peut-elle encore survivre ?
Pour Céline Tricart, réalisatrice et stéréographe, « si le dispositif d’aides en faveur des œuvres S3D est présente, c’est du côté des producteurs et des diffuseurs que l’on sent une réticence qui s’avère être un frein énorme au développement du secteur ».
Robert Franke, responsable des contenus chez Magic Internet, et consultant pour les achats de la chaîne allemande ProSieben, apporte un éclairage important. Pour lui, « il ne faut pas penser votre œuvre comme étant en S3D. Pensez œuvre avant tout : de votre approche marketing au moyen avancé pour attirer les financements des chaînes, toute votre stratégie doit, en quelque sorte, s’affranchir de la technique. Soyez présents sur les marchés du film, pas uniquement sur les marchés S3D. Le relief, en Europe, est encore perçu comme de la production d’auteur, c’est-à-dire un peu artisanal. Passez ce cap et avancez dans une démarche industrielle… sur votre promotion. »
Quant à la question première de savoir s’il y a une « industrie de la 3D en Europe », tous s’accordent à dire qu’il y a « une 3D artisanale européenne », en convenant qu’il faut dépasser ce modèle pour éviter un isolement aux conséquences dramatiques.

Conversion versus natif

Dimension 3 Expo a parfaitement appréhendé cette nécessité de dépasser le seul marché européen et proposé tout au long des trois jours, plusieurs sessions de haute volée sur des longs métrages marquants de ces derniers mois… ou à venir.
Citons notamment The Lorax réalisé par Chris Renaud et produit intégralement dans le studio parisien de Illumination MacGuff, Underworld 4 présenté par Kasimir Lehto, ou encore une édifiante keynote de Pixar sur l’approche de la S3D dans l’animation.
Le studio londonien de MPC (The Moving Picture Company) était représenté par deux « frenchies » en la personne de Alexandra Added, VFX Film Manager, et Axel Bonami, Compositing Supervisor. Leur propos n’était pas de mettre dos à dos deux longs métrages – John Carter of Mars et Prometheus – mais de mettre en parallèle deux modes de mise en relief. À la conversion dans le premier cas, en natif pour le second.
Force est d’admettre que Ridley Scott, bien que peu ouvert de prime abord à cette technique, a été séduit par ses potentialités, en dépit d’équipes lourdes, jusqu’à 9 personnes pour une caméra 3D (avec un total de 4 sur le plateau dans certains plans). La prise en compte de ce type de prises de vues en amont a permis non seulement d’ouvrir le champ des possibles mais surtout d’anticiper les contraintes pour réduire le budget. À l’inverse, le long métrage d’Andrew Stanton a fait l’objet de nombreux allers-retours entre le prestataire et la production car la conversion relief « ne consistait pas, comme certains pouvaient le penser, à uniquement recalculer un œil ».

Certains y verront la confirmation de ce que l’on évoquait en préambule : l’échec cuisant du film au box-office (qui a coûté 120 MUS$ à Disney et la tête de l’un de ses CEO) a mis en lumière les limites d’une S3D utilisée à fins uniquement marketing…