État des lieux et perspectives du documentaire audiovisuel français

Présentée au Sunny Side of the Doc, l’étude 2024 du CNC sur le documentaire audiovisuel français constate une stabilisation de la production après plusieurs années de baisse.
© Mediakwest / Génération Numérique

La baisse du volume de production, qui a démarrée principalement suite à un recentrage des aides du CNC sur le documentaire de création en 2014, semble terminée puisque le volume horaire aidé, de l’ordre de 1 686 heures, marque même une légère augmentation de +1,0 % par rapport à 2022.

Du côté du financement, le coût horaire de production s’est également stabilisé autour de 200 000 euros depuis 2020.

On remarque aussi que les diffuseurs restent les principaux financeurs des documentaires aidés, contribuant à hauteur de 154,1 millions d’euros en 2023, soit à hauteur de 45,1 % des devis. Toutefois, leur part a diminué de 6,1 points sur dix ans, un recul en partie compensé par une augmentation des apports des producteurs et des financements étrangers.

Par ailleurs, le CNC demeure une source de financement majeure, couvrant 18,8 % des devis des documentaires aidés, avec un apport horaire en hausse de +23,3 % sur dix ans.

 

Les diffuseurs publics, clé de voûte de la production documentaire

Les chaînes publiques nationales demeurent les principaux acteurs à porter la filière. France Télévisions et Arte sont en effet les principaux contributeurs, fournissant respectivement 46 % et 21 % des apports diffuseurs.

En 2023, ils ont commandé 54,8 % du volume horaire total et France Télévisions a investi 75,5 millions d’euros pour 777 heures de programmes, tandis qu’Arte a maintenu un niveau stable d’investissement à 32,4 millions d’euros pour 230 heures.

L’implication des plateformes est par ailleurs en augmentation de 19,3 %, atteignant 68 heures en 2023. On peut souligner que si leur volume horaire reste encore limité, ces plateformes investissent dans des œuvres plus coûteuses, avec un coût horaire moyen de 653 500 euros, bien supérieur à la moyenne globale.

 

Une diversité des genres et des formats documentaires

Les documentaires de société dominent la production, représentant la moitié des heures aidées en 2023. Les commandes de documentaires historiques, animaliers et de spectacle vivant ont cependant augmenté, au détriment des documentaires sur les arts et les sports. Chez les diffuseurs les deux chaînes offrant la plus grande variété de thématiques sont Arte et France 5.

Les documentaires unitaires restent majoritaires, représentant près de 90 % des œuvres aidées en 2023. Cependant, les séries documentaires, bien que minoritaires, tendent à être plus coûteuses, avec un coût horaire moyen de 222 300 euros.

La majorité des genres ont vu leurs coûts horaires augmenter au cours des dix dernières années, en particulier les documentaires sur les arts et les sports mais les documentaires scientifiques et historiques restent les plus coûteux à produire, avec des coûts horaires moyens respectivement de 276 000 et 269 000 euros.

 

Financement et aides publiques

Le CNC soutient une grande diversité de projets documentaires à travers son dispositif de soutien sélectif. En 2023, le budget alloué au documentaire a atteint 8,6 millions d’euros, permettant de financer 342 projets, dont 209 ont bénéficié d’aides à la préparation. Le taux de sélectivité qui a légèrement baissé est de 72 %.

Le crédit d’impôt audiovisuel (CIA) joue aussi un rôle crucial dans le financement des documentaires. En 2023, 678 heures de documentaires ont bénéficié du CIA, représentant 40 % des heures aidées par le Fonds de Soutien Audiovisuel (FSA). Le montant total des crédits d’impôt accordés a atteint 30,5 millions d’euros, en hausse de 9 % par rapport à 2022.

 

Internationalisation et exportation des documentaires français

Les ventes de documentaires français à l’international ont atteint un niveau record de 48,6 millions d’euros en 2022, marquant une augmentation de 32,1 % par rapport à l’année précédente.

Dans ce contexte, les diffuseurs TV européens restent les principaux acheteurs, avec l’Europe de l’Ouest représentant 50 % du marché. La Belgique et l’Allemagne sont les premiers territoires d’exportation.

Les documentaires français bénéficient également d’une bonne visibilité sur les plateformes de vidéo à la demande (VàDA). En 2023, près de 4 000 documentaires étaient disponibles sur ces plateformes, un volume multiplié par 2,8 en cinq ans, avec une appétence pour les séries documentaires qui représentant 72 % de la consommation de documentaires en VàDA.

 

Perspectives et défis

Du côté technologique, en 2023, 34 % des professionnels ont déclaré avoir utilisé des outils d’IA, principalement pour l’automatisation des tâches répétitives et les gains en efficacité. Cependant, des préoccupations subsistent concernant la qualité des résultats et le respect du droit d’auteur.

Du côté de la compétitivité à l’international, pour renforcer leur présence, les producteurs français doivent diversifier les formats et les sujets de leurs documentaires. La production de séries documentaires, en particulier, peut répondre davantage aux exigences des marchés internationaux et attirer davantage de préfinancements étrangers.

En termes de nouveaux formats, le CNC soutient plus que jamais l’innovation dans le secteur, notamment à travers des aides à la création numérique et immersive. En 2023, 57 documentaires ont bénéficié de ces aides, couvrant des projets de réalité virtuelle, d’expositions immersives et de spectacles vivants augmentés.

 

La filière du documentaire audiovisuel français atteint  donc aujourd’hui à un seuil de stabilisation de la production. L’apport financier accru du CNC et récemment de France Télévisions de même que les succès à l’exportation consolident la filière. Cependant, pour maintenir et renforcer cette dynamique, une diversification des formats et des approches ambitieuses susceptibles de séduire les marchés internationaux restent de mise…

 

Références
  • CNC. “Le documentaire audiovisuel français : état des lieux et perspectives.” Présentation au Sunny Side of the Doc, 26 juin 2024.
  • Médiamétrie – Médiamat. “Consommation de documentaires en TV et VàDA.” 2023.
  • CNC-Unifrance. “Rapport sur les ventes internationales de documentaires français.” 2022.