Gus : petit budget, grand film d’animation !

Ces dernières semaines, les longs-métrages d’animation français se succèdent à grande vitesse. On a tous encore en tête la qualité des images et de la comédie d’Astérix : Le domaine des Dieux produit par M6 et dont la production exécutive était assurée par Mikros Image Animation Paris avec l’aide des studios belges Dreamwall et Nozon, que déjà un nouveau-né surgit, Gus, petit oiseau grand voyage, (sorti en salle mercredi dernier, le 4 février). Ce long-métrage a été produit à 100 % en France au cœur des studios TeamTo de Paris et Bourg-les-Valence.
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S’il dispose d’un budget moindre de 10 millions d’euros, Gus place la barre tout aussi haute en termes de qualité de l’histoire et de l’animation que des blockbusters internationaux. Ce film d’animation s’appuie notamment sur de très belles images et une grande qualité d’animation pour raconter, avec humour et sensibilité, la migration un peu particulière d’un groupe d’oiseaux vers l’Afrique. La clé de cette qualité tient sans doute à la capacité de Corinne Kouper, la productrice, et de Guillaume Hellouin, le producteur délégué, de réunir tout au long des cinq ans de production de ce film des talents très complémentaires à la fois sur le plan artistique et technique.

 

Il y eut d’abord la qualité du scénario et l’originalité du design graphique des personnages qui sont le fruit de la rencontre entre deux anciens élèves de l’École La Poudrière, le scénariste Antoine Barraud et le Directeur artistique Benjamin Renner. Ce dernier fut notamment remarqué dans le passé pour son court-métrage de fin d’étude (La Queue de la souris en 2007) et en tant que coréalisateur du film Ernest et Célestine nominé aux Oscars 2014. C’est Benjamin Renner qui a donné aux plumes des oiseaux, principaux héros du film, ce style si particulier inspiré de la technique du papier découpé. Cette stylisation très forte se marie d’ailleurs très bien avec une 3D stéréoscopique parfaitement maîtrisée tout au long du film.

 

Fait notable aussi, Antoine Barraud, le scénariste, a pu s’appuyer sur les milliers d’anecdotes racontées par l’ornithologue de terrain Guilhem Lesaffre que lui a fait rencontrer Corinne Kouper, pour bâtir cette histoire pleine de rebondissements. Ainsi, au fil de ces anecdotes vécues qui enrichissent le scénario, le spectateur sera surpris de savoir que le dénouement du film est issu d’une histoire réellement arrivée à des oiseaux migrateurs.

 

Il y a enfin tout le talent de Christian De Vita dont c’était le premier film en tant que réalisateur, mais qui avait une grande expérience du story-board en ayant notamment déjà travaillé avec Wes Anderson sur celui de Fantastic Mr. Fox ou avec Tim Burton sur Frankenweenie. Last but not least, pour donner tout à fait son envol au film, TeamTo a fait appel à un compositeur de renom pour la bande musicale, Stephen Warbeck, Oscar de la meilleure musique pour Shakespeare in Love.

 

Au-delà du respect permanent de la stylisation des personnages qui fait la spécificité de Gus, le réalisateur italien a surtout un talent pour transposer ses idées à l’écran en essayant toujours de trouver une fluidité de mouvement et une rythmique particulière pour chaque scène, notamment dans la manière dont les personnages interagissent. Et, comme la plupart des scènes du film se déroulent au milieu d’une escadrille d’oiseaux migrateurs, il va sans dire que l’art de la mise en scène de Christian De Vita fait merveille.

 

Pour fabriquer ces 90 minutes d’animation en 3D relief, le studio TeamTo s’est appuyé sur plus de 300 animateurs durant deux ans et sur les outils les plus en pointe en matière de rendu 3D. TeamTo a fait appel au moteur de rendu 3D Renderman, développé par Pixar et utilisé le plus souvent sur les longs-métrages du fait de sa très bonne optimisation entre qualité du rendu et temps de calcul. Une donnée technique non négligeable puisque chaque scène était créée d’emblée en 3D stéréoscopique et vérifiée au visionnage au sein même du studio TeamTo.

 

Des développements informatiques spécifiques furent aussi nécessaires afin de donner une belle sensation de volume aux nuages ou d’être capable d’avoir un rendu dynamique des plumes d’oiseaux dont le style non réaliste ne repose sur aucune référence existante. Enfin, les yeux des spectateurs les plus aguerris noteront qu’un soin tout particulier a été porté à la cohérence de la photographie tout au long du film. Cela a été rendu possible grâce à des process de validation renforcés vis-à-vis des pipelines d’une série TV auquel était plutôt habitué TeamTo et aussi grâce à l’intervention d’un Directeur photo, Laurent Fleutot, un des chef-opérateurs du film Le peuple migrateur, deux facteurs qui donnèrent sans doute in fine ces impressions à la fois si réalistes et chatoyantes à la vue du film.