Une idée qui vient d’Imax
Les “Inhumans” sont des personnages créés par la société d’édition Marvel que Disney, qui contrôle aussi ABC, a rachetée en 2009.
C’est Imax qui a suggéré l’idée du lancement au cinéma tout en proposant à Disney de contribuer au financement des deux épisodes. Pour optimiser la qualité des projections, certaines séquences seront tournées avec les technologies de captation Imax.
En obtenant cette diffusion exclusive des débuts d’une aventure inédite de Marvel, Imax va se distinguer une fois encore des circuits de salles concurrents qui ont lancé leurs propres formats de projection premium.
L’opération a en plus de bonnes chances d’être rentable pour Imax : la sortie d’ “Inhumans” ne passera pas inaperçue sur ses écrans, ABC devant investir massivement dans la promotion de cette nouvelle série qui représente pour le groupe Disney l’un des plus gros lancements de l’année 2017.
Quoiqu’il arrive, “Inhumans” va arriver à un bon moment dans les salles Imax car le début du mois de septembre est généralement une période calme pour les cinémas américains (les gros blockbusters de l’été sont déjà sortis depuis plusieurs semaines). Ca n’empêche pas que les programmateurs d’Imax vont devoir déprogrammer quelques films pour faire de la place à “Inhumans”.
Imax fait donc a priori une bonne opération mais que vont en tirer ABC, Marvel et Disney ?
Frapper très fort pour être vu
“Inhumans'” sera l’une des 500 séries diffusées sur les chaînes américaines en 2017. Un record absolu, d’autant plus impressionnant que ce chiffre exclut les rediffusions (il prend seulement en compte les séries qui seront lancées dans le courant de l’année et celles qui vont se poursuivre avec des épisodes inédits).
Les opérateurs de streaming sont les premiers responsables de cette hyperinflation des séries, Netflix en tête qui aura investi six milliards de dollars dans la production de programmes inédits en 2016 (à comparer aux deux milliards dépensés par HBO, la chaîne de référence sur le câble). S’y ajoutent Amazon et, même s’ils suivent assez loin derrière, les autres promoteurs de la vidéo en ligne par abonnement (SVOD) qui sont de plus en plus nombreux et redoublent d’efforts pour attirer les nouveaux abonnés, les séries étant le moyen le plus sûr de les séduire et de les fidéliser.
Les chaînes de télévision traditionnelles (du câble) ne restent pas inertes. Si elles perdent de l’audience – moins que prévu, notamment parce qu’elles restent la lucarne privilégiée pour les programmes de flux (information, divertissements,…) -, ces chaînes continuent quand même à investir massivement dans les séries pour retenir leurs abonnés et alimenter les services de streaming qu’elles créent les unes après les autres (à moins qu’elles revendent les droits de diffusion à d’autres opérateurs de SVOD).
Cette explosion de la production fait notamment le bonheur des acteurs : les stars dont la notoriété peut assurer celle d’une série et attirer les spectateurs et les abonnés sont particulièrement sollicitées et les salaires s’envolent (Robert de Niro perçoit 750 000 $ par épisode pour une série d’Amazon, Meryl Strip 825 000 $ pour une mini-série produite par Warner).
Autre conséquence, les opérateurs sont obligés d’investir massivement dans la promotion pour faire sortir leurs programmes du lot. C’est principalement ce besoin de se distinguer qui aurait incité ABC à accepter la proposition d’Imax. Malgré ses personnages Marvel, “Inhumans” doit frapper très fort pour passer au dessus des autres séries qui seront nombreuses à démarrer au même moment.
“Inhumans” n’est pas la première série dont on fait la promotion dans les salles de cinéma : deux épisodes de Game of thrones (que produit la chaîne HBO) avaient déjà été programmés en 2015 sur plusieurs écrans Imax aux Etats-Unis. Mais le but de l’opération était d’asseoir le succès triomphal de la série (qui entrait dans sa quatrième saison) alors qu’il s’agit, dans le cas d'”Inhumans”, de bâtir la notoriété internationale d’un concept en le lançant comme une superproduction cinématographique (dont l’essentiel ne sera visible qu’à la télévision).
D’autres séries vont elles passer par la case cinéma pour se faire connaître ? Si les lancements de ce genre se multiplient, l’impact risque de s’émousser rapidement. Surtout, il paraît difficile d’imaginer que les exploitants américains se mettent à programmer des séries en grand nombre alors qu’ils sont engagés dans une stratégie premium visant à distinguer autant que possible le cinéma des offres que les spectateurs reçoivent chez eux. A moins peut-être de proposer les séries dans les salles pendant les heures creuses. Mais est-ce la formule de promotion rêvée pour des programmes qui vaudraient paraît il largement ceux du cinéma ?