Sunny Side of the Doc 2025 – Les dessous de Kaizen, le documentaire événement avec Inoxtag

Avec plus de 11 millions de vues sur YouTube en à peine 24 h lors de son lancement en septembre 2024, le documentaire Kaizen, racontant l’ascension de l’Everest par le créateur de contenu Inoxtag, a été l’un des plus gros succès français de la plateforme. Son réalisateur, Basile Monnot, a profité d’un passage au Sunny Side of the Doc pour raconter les coulisses de cette réussite.
©Mathis-Dumas-24

En septembre 2024, le nom d’Inoxtag était sur toutes les lèvres. Après s’être retiré pendant plusieurs mois de la plateforme YouTube, qui l’avait fait connaitre, le créateur de contenu aux plus de 9 millions d’abonnés annonce la sortie de son documentaire, Kaizen, dans lequel il relève le défi de se préparer et de gravir à l’Everest en une année. Résultat : 11 millions de vues en 24 h et 350 000 tickets vendus pour des projections événements dans les cinémas MK2. Mais cette effervescence n’était pas qu’un feu de paille, puisque le documentaire continue son ascension en atteignant les 44 millions de vues sur YouTube (chiffre relevé en juin 2025). Présent au Sunny Side of the Doc, le réalisateur Basile Bonnot – spécialisé à l’origine dans les clips musicaux et la publicité – détaille les ingrédients qui ont pu faire de Kaizen un grand succès.

 

Une liberté dans la réalisation et le storytelling

« Quand Inoxtag est venu me voir pour me présenter son projet, il n’y avait pas de producteur, mis à part lui. Il a insisté sur ce point : nous allons faire une œuvre pour YouTube, alors nous sommes totalement libres », raconte Basile Monnot. Cette liberté dans la forme artistique est visible rien qu’à la bande-annonce. En quelques plans, le réalisateur agrège des plans tournés au drone (assez classique du genre documentaire) à des séquences d’animation 3D et des successions de shoots très esthétisées (plus proches de la publicité) ainsi que des moments de présentation face caméra (typique de Youtube). Cette esthétique hybride, qui emprunte à tous les savoirs faire d’Inoxtag et de Basile Monnot, a su séduire la jeune audience du créateur de contenu.

« Mais il ne suffit pas d’avoir un influenceur connu dans son film pour connaitre le succès », met en garde Basile Monnot qui insiste : « le plus important c’est le storytelling, c’est notre manière de créer l’événement ». Pour le projet Kaizen, cet évènement a été pensé et mis en scène pendant de longs mois. Le projet du documentaire a d’abord été annoncé sur la chaîne Youtube d’Inoxtag avant qu’il ne s’absente de la plateforme pendant six mois pour revenir en septembre 2024. « Inoxtag connait son public qui est majoritairement très jeune. Septembre, c’est la rentrée des classes et ainsi tous les adolescents ont pu en parler entre eux ».

Le sujet du documentaire se devait aussi de séduire cette jeune audience.  « Inoxtag n’est pas la première personne à gravir l’Everest. Alors notre histoire ne reposait pas que sur ça. Il fallait montrer sa transformation, ses entraînements pour devenir meilleur, que ce soit dans sa performance ou humainement.

C’est l’histoire d’un parcours, d’une quête de soi dans laquelle chacun peut se retrouver ». Cette ligne directrice correspond aux attentes des spectateurs de YouTube ou des réseaux sociaux, qui demandent que les contenus soient marqués par une certaine authenticité. « On le filmait tout le temps, même dans les moments les plus difficiles. On voulait que le spectateur le suive de bout en bout, sans qu’il n’y ait d’interviews réalisées après coup pour commenter les faits – ce qui est courant dans le documentaire. Notre manière de faire, avec des commentaires directs face caméra correspondait bien plus aux codes de YouTube et des réseaux sociaux. »

(c) Mathis Dumas
Une nouvelle manière de financer ses projets

C’est justement cette mise en scène de l’événement et ce storytelling qui a permis au projet d’Inoxtag d’être financé. Au départ, le youtubeur s’est lancé seul dans l’aventure en avançant plus d’un million d’euros. « Il répétait que s’il risquait sa vie pour ce projet, il pouvait aussi risquer ses économies », ironise Basile Monnot.

Puis, grâce à l’intérêt qu’il a pu susciter chez son public, les marques, premièrement réticentes, ont fini par investir dans le projet (parmi lesquelles Nike, partenaire de longue date du YouTubeur ou encore Orange et Fitness Park). « Inoxtag a créé une nouvelle manière de financer son projet. Normalement, en France, une marque paye pour une vidéo. Elles ne sont pas plusieurs à s’allier pour un contenu. Mais au vu de l’ambition de Kaizen, elles ont compris que c’était nécessaire mais aussi rentable », précise Basile Monnot.

Cette grande présence des collaborations commerciales dans le documentaire (qui a suscité quelques critiques) a poussé Inoxtag à développer une stratégie de diffusion et de promotion complémentaire en créant d’autres contenus sous forme de pastilles pour YouTube et les réseaux sociaux. « Inoxtag a une vraie vision. Il sait avant même de tourner si un passage, en format court, va fonctionner sur TikTok et ramener de l’audience. Comme nous avions beaucoup de rushs, nous avons pu conserver ceux qui n’avaient pas été retenus pour Kaizen et nous en servir sur d’autres supports ». Les marques, visibles quelques secondes dans le documentaire, ont pu bénéficier de leurs temps publicitaires grâce à ces contenus additionnels. « C’était très important de montrer aux investisseurs où ils se situaient dans notre stratégie. Ils avaient ainsi une vraie visibilité auprès du public sans que le documentaire en lui-même leur soit entièrement consacré ».

Même si Kaizen reste disponible gratuitement sur YouTube, il est aujourd’hui présent dans le catalogue de Disney+ et a aussi bénéficié d’une diffusion sur TF1. « Nous savons que l’audience est fragmentée. Un père de famille par exemple, n’aura pas le réflexe d’aller regarder un documentaire sur YouTube, mais il aura peut-être le réflexe d’aller le chercher sur Disney+ ou de profiter de sa diffusion un soir sur TF1 ».

Ses sponsors, son rachat par quelques diffuseurs ainsi que la monétisation des contenus sur les réseaux sociaux et YouTube, ont permis à Inoxtag de rentabiliser son investissement de départ tout en accroissant sa popularité.

Cependant, Basile Monnot rappelle : « Il n’y a pas de recette miracle pour un succès. Certaines musiques font un tabac sur TikTok sans qu’on ne sache pourquoi. Il faut comprendre et accepter ce nouveau jeu. »