Inauguration d’un premier écran premium chez CGR

CGR a ouvert sa première salle ICE (Immersive cinema experience) le 14 décembre dans son multiplexe de Blagnac (agglomération de Toulouse). Pour Jocelyn Bouyssy, le directeur général de CGR, c'est un défi comparable à celui que le groupe s'était lancé en 2007 quand il a décidé d'être le premier circuit d'Europe à passer au numérique. Explications.
salle ice.JPG

Défis

Comment a mûri le projet ICE ? “Un circuit comme CGR doit faire évoluer son offre régulièrement et le moment était venu pour un nouveau changement d’envergure huit ans après le passage au numérique”.

Jocelyn Bouyssy explique que l’idée d’une salle haut de gamme faisait déjà son chemin depuis un moment au sein de la direction du groupe qui a analysé l’évolution des offres premium, notamment aux USA. Et “après l’introduction réussie de la projection 4K et de Dolby Atmos dans plusieurs de nos salles, il nous paraissait logique de proposer à nos spectateurs une offre fondée sur les technologies les plus récentes et les plus performantes” (laser RGB, son immersif).

Mais le cinéma haut de gamme marque aussi une rupture pour CGR. Comme Jocelyn Bouyssy le souligne, “lancer une offre premium dans un circuit qui garde une image plutôt populaire ne tombe pas sous le sens”. Sébastien Bruel, directeur technique du groupe, rappelle que “CGR a longtemps été opposé à tout ce qui pouvait contredire cette image”, notamment la vente de places numérotées qui est une composante de l’offre premium de CGR : “quand nous avons repris le multiplexe de Lanester à UGC, qui proposait cette formule, nous l’avons abandonnée car nous ne la jugions pas compatible avec nos pratiques”.

Monter en gamme est un premier défi pour CGR. Jocelyn Bouyssy en ajoute deux autres : “ICE est une offre qu’il est impossible de valider avant de l’avoir mise en oeuvre : quel type d’étude nous aurait permis de vérifier le bienfondé d’un concept qui consiste à faire payer plus cher pour une prestation cinématographique haut de gamme alors que nous sommes déjà censés proposer un service irréprochable à nos spectateurs ?”

Dernier défi qui découle en partie du précédent : “on ne travaille pas sur un projet comme ICE avec un tableau de comptabilité analytique à la main. Quand il faut réduire drastiquement le nombre de fauteuils dans une salle tout en y réalisant des investissements sans commune mesure avec ceux qu’on consent habituellement, on ne se focalise pas sur les aspects financiers”.

Un pré-lancement réussi dont CGR est loin de se contenter

Durant les jours qui ont précédé l’inauguration, le CGR de Blagnac a enregistré 1 200 pré-réservations pour la salle ICE. Mais Jocelyn Bouyssy ne s’appesantit pas sur ce résultat : “c’est le résultat d’une importante campagne de promotion dans l’agglomération et ce n’est pas pour n’importe quel film [Star wars Rogue one, premier film programmé dans la salle ICE]. Sans oublier que les fêtes de fin d’année offrent un contexte favorable”.

“Tout va se passer maintenant” poursuit Jocelyn Bouyssy : “nous allons écouter les spectateurs et nous déciderons de l’avenir d’ICE après avoir analysé leurs réactions”. Les Mega CGR de La Rochelle et de Clermont Ferrand sont les deux prochains multiplexes du groupe censés accueillir une salle premium.

Concilier haut de gamme et accessibilité

Le tarif plein de la salle ICE est de 15 €, soit une augmentation de plus d’un tiers par rapport au tarif plein habituel (11€). Une hausse non négligeable (les exploitants américains de salles premium pratiquent des majorations de cet ordre) mais CGR s’est attaché à ne pas pénaliser ses spectateurs.

Alors que les offres premium sont proposées aux USA dans les plus grandes salles, CGR a choisi un écran de taille intermédiaire (13 mètres de base) pour installer le concept ICE. “Il était exclu de léser les spectateurs de Blagnac qui préfèrent voir les films sur notre plus grand écran, même si c’est une cible de notre concept premium”.

Pour éviter que le haut de gamme crée une ségrégation, CGR a mis en place un deuxième garde fou : les films projetés dans la salle ICE seront systématiquement proposés en même temps sur un autre écran du multiplexe de Blagnac.

Un confort au service du spectacle

C’est avant tout l’espace entre les fauteuils qui surprend dans la salle ICE : pouvoir allonger les jambes autant qu’on le souhaite est un plaisir inhabituel dans une salle de cinéma mais une vraie nécessité quand on dispose d’une assise inclinable. CGR l’a bien compris en sacrifiant le tiers de la capacité de la salle (200 fauteuils contre 300 précédemment).

Le degré d’inclinaison des fauteuils que CGR a conçus avec Kleslo n’est cependant pas aussi prononcé qu’on pourrait s’y attendre : un angle raisonnable qui maintient clairement plus en position assise qu’allongée.

Jocelyn Bouyssy justifie ce mélange de confort spacieux et de sobriété : “le spectacle doit rester sur l’écran. La conception de la salle a été entièrement orientée vers cet objectif : les spectateurs doivent pouvoir profiter le mieux possible de leur projection”.

Les technologies de projection et de son

Le spectacle est non seulement sur l’écran mais aussi dans les quelque 40 hauts parleurs accrochés aux murs et au plafond de la salle pour restituer le son Dolby Atmos. La salle ICE de Blagnac est le quinzième écran CGR doté de cette technologie (il y a désormais 75 écrans Atmos en France et plus de 2 000 dans le monde).

L’écran ICE est le premier d’Europe à être équipé du projecteur laser Christie Solaria CP42LH. Il développe près de 60 000 lumens comme les précédents modèles laser RGB de Christie mais intègre une nouvelle architecture de projection destinée à atténuer les effets de chatoiement (speckle) inhérents aux lasers de forte puissance (voir l’article : “laser RGB : différences entre les projections 6P et 9P).

Utiliser un projecteur aussi performant et aussi puissant sur un écran de taille intermédiaire présente un intérêt indéniable en terme de qualité d’image : la projection en relief de Star wars Rogue one est réalisée avec un niveau de luminosité exceptionnel de 10 foot lambert. Autant dire que la 3D projetée dans la salle ICE n’est pas celle qu’on a l’habitude de voir.  Encore faut il préciser que la puissance lumineuse a été volontairement limitée à 10 fL. Elle aurait pu sans difficulté atteindre les 14 fL (la norme imposée pour les projections en 2D).

La salle ICE de Blagnac est la première en France à recevoir le nouveau label d’excellence de la CST, comme l’a annoncé son responsable technique du secteur diffusion, Pierre Edouard Barratange, arrivé la veille de l’inauguration pour effectuer les tests de conformité.

Le concept ICE intègre une autre innovation inédite en France : un dispositif d’éclairage des murs latéraux conçu par Philips, dont les couleurs et les formes peuvent être harmonisées avec celles des images projetées sur le grand écran. Ce système baptisé Lightvibes est destiné à accompagner les premières parties de séances (publicités,…) et les projections de certains contenus alternatifs comme les concerts. C’est une autre façon de renforcer la sensation d’immersion des spectateurs, pendant les projections hors films.

Il va maintenant falloir attendre que CGR statue sur l’avenir d’ICE pour savoir si ce concept qu’on peut d’ores est déjà qualifier de réussite en est totalement une. Les décisions que va prendre CGR auront des répercussions importantes sur l’avenir du cinéma haut de gamme en France : elles influenceront obligatoirement les choix des autres exploitants tentés par le premium.