
Les RADI ont été introduits par une évocation très documentée de la construction de l’écosystème numérique français. Pourquoi ce rappel ?
Stéphane Singier : L’émergence du Pôle image à Angoulême a coïncidé avec la construction d’une politique numérique au niveau national. Le rappeler – et inviter ceux qui y ont participé – nous semblait important à l’heure des technologies émergentes. Pour paraphraser Pierre Hénon, le futur a un passé.
Le secteur des ICC (Industries culturelles et créatives) peut-il développer un écosystème pertinent autour des technologies de l’IA ?
Aux Rencontres, nous montrons comment nous savons déjà traiter en IA des modèles de voix, faire de la traduction et créer des dialogues, retirer un son d’une bande son… Quant à générer de l’animation, une piste prometteuse apparaît avec la Video to Animation. La communauté de la recherche publique de son côté se montre particulièrement active en France. J’en veux pour preuve la méthode 3D Gaussian Splatting (publiée au Siggraph 2023) qui, en à peine un an, a déjà impacté toute la communauté graphique. Tout cela pourrait donc constituer une base pour réinventer les futurs outils d’animation. Mais si nous arrivons aujourd’hui à assez bien identifier nos besoins, il faut encore trouver quel écosystème français ou européen pourrait favoriser l’émergence d’un modèle large basé sur notre culture permettant de nourrir nos IA dans le cadre des Industries culturelles et créatives.
La session sur l’open source a fait appel à l’intelligence collective. Où en est l’open source en France ?
Il y a une longue traîne de l’open source en France – presque vingt ans l’an prochain – portée par des entreprises qui ont appris à identifier leurs besoins et comment collaborer. Voir le projet HD3D créé en 2005 qui fédérait déjà une dizaine de studios français pour mettre en place un outil open source. On peut dire que des outils actuels comme le logiciel de suivi de production Kitsu (CG Wire), le logiciel de photogrammétrie Meshroom (Technicolor Creative Studios), le lecteur multimédia VLC qui est très largement utilisé aujourd’hui (etc.) sont en filiation directe. On constate aussi que ces projets de recherche et développement en open source ont une persistance dans le temps supérieure à d’autres projets et qu’ils arrivent en bonne place à l’international. Mais il manque effectivement une structure permettant d’identifier les sujets communs de développement d’outils des futurs pipelines des studios.
Extrait de l’article paru pour la première fois dans Mediakwest #60, p.122-128