Un atelier Media Engineering Intelligence consacré à la 4K / UHD

Le salon IDIFF, qui s'est tenu les 28 et 29 janvier aux Docks Pullman à Saint-Denis, a été marqué cette année par un surprenant engouement du public pour le format émergent de l'imagerie numérique de demain : l'Ultra Haute Définition.
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Dans ce contexte, quelques professionnels privilégiés ont pu participer à la troisième édition des ateliers/rencontres organisés à l’initiative de la société Mesclado, en partenariat avec la SMPTE. L’occasion d’une véritable immersion dans les spécificités de la 4K/UHD, ouvrant les perspectives de ce format innovant pour l’avenir. François ABBE, dirigeant de Mesclado et initiateur de ces rencontres, s’était cette fois entouré d’experts provenant d’horizons divers, mais dont les préoccupations semblent converger vers une image de très haute qualité.

 

 

Leur objectif commun est la maitrise des concepts qui permettront, dans un terme encore incertain, de produire et de consommer ces images d’une nouvelle dimension. Pour accorder aux intervenants un temps de parole à l’échelle du sujet, ce workshop se déroulait exceptionnellement sur la journée entière, et démarrait dès 9h30 par les retrouvailles des habitués de ce sympathique rendez-vous.

 

 

Après une rapide ouverture des débats, c’est l’expert anglais Peter Wilson (directeur de High Definition Digital Cinema) qui posait le décor avec un rappel historique de l’évolution qualitative des images électroniques devenues numériques, avec une évocation des principes fondamentaux des formats 4K et 8K pour le cinéma et les applications vidéo UHD. Ces formats apportent une meilleure définition d’image… mais pas seulement : l’UHDTV1 double le nombre de pixels horizontaux et verticaux de l’image HD de référence actuelle, et utilise une matrice 4x plus étendue de 3840 x 2160 pixels.

À l’horizon, l’autre standard UHDTV2 anticipe l’étape suivante de cette quête de qualité en redoublant la mise, avec cette fois 7680 x 4320 pixels. Pour capter de telles quantités d’informations visuelles en conservant les facteurs de forme des équipements de prises de vues actuels, les technologies optiques et électroniques mises en œuvre dans les caméras se heurtent à des contraintes physiques majeures qui amènent assez naturellement à faire ressurgir les théorèmes fondamentaux, comme celui de l’échantillonnage de Nyquist-Shannon qui est revenu régulièrement dans les explications données au cours de la journée. Les autres éclairages technologiques apportés par Peter Wilson au cours de ses diverses interventions, ont été un exercice pédagogique particulièrement apprécié par l’auditoire, que ce soit en termes de profondeur de codage binaire (bit deph), de balayage progressif et de cadence d’image (HFR compris entre 50 et 120 images par seconde), d’espace colorimétrique élargi (avec un nouveau repère spécifié REC 2020) et de dynamique de la luminosité (HDR).

 

 

Dans leur exposé, Christophe Barbé (Chef de projet 4K – EuroMedia France) et Christophe Chatain (Direction de l’Organisation & SI – Fédération Française de Tennis) venaient témoigner du retour d’expérience partagée depuis 2013 à l’occasion de la captation et la diffusion de rencontres de tennis internationales organisées par la FFT. L’occasion de décrire les dispositifs techniques expérimentaux déployés récemment par EuroMédia avec l’aide des constructeurs (EVS, Panasonic, Rohde & Schwartz, Sony, entre autres) pour disposer de toute la gamme d’équipements capables de traiter cette image surdimensionnée.

Aux nombreuses questions qui se posent sur la post-production 4K / UHD, Cédric Lejeune (directeur de Workflowers) et Peter Wilson apportèrent des éléments de réponse tangibles grâce à des cas d’usage qui faisaient échos aux préoccupations de nombreux participants, confrontés aux problématiques 4K pour la production cinéma et bientôt pour la vidéo.

 

 

En fin de matinée, le thème de la Distribution des contenus 4K / UHD pour le grand public était traité par Ludovic Bostral (spécialiste de la vidéo en ligne – Digibos) et Cristiano Benzi (Directeur Business Unit vidéo et radiodiffusion – Eutelsat). Le premier s’inscrivait dans une approche new media en donnant des explications sur le transport par internet des vidéos en streaming. Avec une myriade de flux, qui accaparerait actuellement un tiers du trafic numérique de l’internet américain, Netflix – qui devrait faire son entrée cette année sur le marché français – pourrait devenir avec YouTube et Amazon un acteur de premier plan pour le développement de la distribution de contenu en très haute qualité sur internet, avec des séries internationales à très gros budget qui sont actuellement fabriquées en 4K/UHD.

 

Autre point de vue, avec une approche broadcast, Cristiano Benzi décrivait, pour sa part, les dispositifs actuels d’expérimentation de diffusion UHD sur les satellites de la flotte Eutelsat, et donnait quelques pistes prospectives sur les évolutions techniques majeures attendues cette année. La disponibilité du codec à hautes performances HEVC compatible 50p/60p, et l’implémentation de la connectique HDMI2.0 étant deux des principales attentes pour simplifier le transport de l’UHD, et abandonner le groupage quad HD des quatre liens 3G/SDI synchronisés qui reproduisent les quatre quarts de l’image.

 

Au cours des présentations, l’accent a été mis sur les technologies des capteurs et optiques qui sont à la source des images, leurs interactions, leurs limitations souvent inavouées, et la confusion fréquente entre les photo-sites du capteur et les pixels restitués à l’image. La taille physique des capteurs : autre facteur déterminant, pour la dynamique de luminosité, pour le grossissement d’image lié à la focale, pour la profondeur de champ, pour le rendu et la qualité photographique finale de la scène filmée.

 

L’intervention de Danys Bruyère (DGA Opérations & Technologies – TSF) portait la voix des prestataires en tournage qui sont confrontés aux souhaits parfois contradictoires de décideurs qui exigent la meilleure qualité possible… pour avoir la latitude de dégrader à souhait leurs images. Réalisateurs et directeurs de la photographie sont souvent à la recherche d’un rendu visuel particulier, rappelant parfois les images stylisées par les défauts de certains objectifs du passé. Très justement, la question « qu’est-ce qu’on croit avoir vu aujourd’hui de l’image UHD ? » a été clairement posée.

 

L’argument commercial 4K cache souvent un défaut de cohérence technologique entre les composants utilisés au long de la chaine de traitement de l’UHD. En termes de résolution, on peut s’interroger sur la qualité des composants qui équipent certaines caméras miniaturisées, fréquemment citées en référence pour la production d’images d’action en 4K. Au-delà de la qualité des images captées, il faut aussi considérer les effets des codages sur les flux numériques en production et en distribution ; considérer aussi les écrans ciblés qui ne sont que rarement en capacité de restituer la masse des informations photographiques transportées à la cadence temporelle élevée de l’UHD.

 

En résumé d’une étude approfondie menée par ses équipes, Mesclado proposait pour sa part une représentation modélisée du format 4K / UHD en 12 points caractéristiques représentés sous la forme d’un cadran horaire. Un moyen pratique de se souvenir que « la 4K / UHD, ce n’est pas seulement des pixels en plus », mais que ce format sera le résultat de l’avancée convergente de tous les paramètres techniques de l’image.

 

Pas étonnant donc qu’en Grande-Bretagne, comme le rappelait F. ABBE, le Digital TV Group rassemblant les principaux acteurs de la télévision outre Manche – et qui est à l’initiative de la création d’un nouveau UHD Forum – se soit donc abstenu de formaliser en l’état un quelconque label « UHD Ready » pour les équipements grand public : il reste bien du travail pour valider le format 4K/UHD.

 

Le prochain rendez-vous trimestriel du workshop Mesclado/SMPTE sera aussi l’occasion de mesurer l’avancement de ce chantier passionnant.