Cinémas : vers des tarifs variables ?

Les hôtels, les compagnies aériennes, les théâtres ou les salles de concert pratiquent depuis longtemps la tarification variable (prix ajustés en fonction de la date de réservation, des places choisies, du niveau de demande,...). Le cinéma est en retard mais il y vient : les 23 multiplexes UCI d'Allemagne sont les premiers à s'engager dans une offre de prix flexibles. Le début d'une révolution ?
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Des tests concluants en Allemagne

Smart Pricer, la société berlinoise qui a mis au point la nouvelle solution de tarification variable d’UCI préfère parler de tarification dynamique. Pour schématiser, l’exploitant choisit parmi les divers paramètres pouvant influer sur le prix du ticket ceux qu’il veut activer pour stimuler la fréquentation de ses salles : jour ou heure de la séance, délai de réservation, place choisie (au fonds, au milieu, devant), potentiel du film, météo,…

La solution de Smart Pricer repose sur un logiciel intégré au système de caisse (Compeso dans le cas de UCI) qui détermine comment chacun des paramètres choisis doit impacter l’évolution, à la hausse ou à la baisse, du prix du ticket. Smart Pricer ajuste les réglages du logiciel pour chaque cinéma en analysant notamment comment la fréquentation a fluctué par le passé et quels mécanismes ont conduit à ces fluctuations.

UCI a commencé à tester la solution en Allemagne fin 2015 dans un multiplexe de Postdam avant de l’étendre à sept autres établissements. Plus de deux ans ont donc été nécessaires pour valider la nouvelle offre tarifaire. Il a fallu d’une part prouver que le système de tarification dynamique a un impact positif sur les recettes des cinémas indépendamment de tout autre facteur. Il a aussi fallu s’assurer de l’acceptation du nouveau principe de tarification par le public : face à une offre tarifaire mouvante (les prix peuvent changer à chaque séance), les spectateurs peuvent devenir méfiants ou se sentir perdus.

L’information délivrée au public sur les principes de la tarification dynamique est une des clés de la réussite du système mais ce n’est pas la seule. Une trop bonne compréhension des principes peut aussi avoir des effets pervers : si le potentiel des films fait partie des paramètres impactant le prix du billet, on peut imaginer un spectateur achetant une entrée à prix modéré pour un film peu demandé, dont il se sert pour aller voir un blockbuster à prix plus élevé dans une autre salle du multiplexe.

UCI n’a manifestement pas eu à déplorer (trop) d’effets pervers de ce type pendant ses tests. Ce serait caricatural d’attribuer uniquement ce résultat à la discipline des spectateurs allemands. Comme dans beaucoup de salles d’Allemagne, les places des cinémas UCI sont numérotées. La vente de tickets à la place que permet cette numérotation limite sensiblement les risques de fraude.

 

USA : Regal lance aussi des tests de tarification

L’an dernier, les recettes des salles nord américaines ont baissé de 12% par rapport à 2016 ce qui a fait plonger les cours de bourse des grands circuits comme AMC, le premier d’entre eux en nombre d’écrans (-21%) ou Regal, le second (- 58%). Expérimenter de nouvelles solutions pour inverser la tendance est devenu plus nécessaire que jamais pour les chaînes de cinéma américaines.

Dans ce contexte de baisse sensible de la fréquentation, proposer une politique tarifaire plus attractive apparaît comme l’un des remèdes les plus indiqués même si ce n’est pas le plus simple à administrer. Les résistances au changement sont notamment fortes du côté des distributeurs qui sont nombreux à redouter une flexibilité des prix assise sur la fraîcheur des films (tarifs décroissant dans le temps).

Regal est le premier circuit américain à annoncer des expérimentations de nouvelles offres tarifaires. La tarification dynamique en fera certainement partie même si ce n’est peut-être pas la seule façon créer des offres tarifaires incitatives. Avec ses 7 300 écrans, le circuit a toute latitude pour tester différents types de formules.

Le groupe AMC va t’il aussi lancer des expérimentations tarifaires ? Ce serait d’autant plus logique que le groupe est depuis 2016 propriétaire d’UCI-Odeon et donc d’UCI en Allemagne dont l’expérience pourrait inspirer à AMC un système de tarification dynamique à l’américaine.