Etude Audiens – La production audiovisuelle et cinématographique accroît sa dynamique en Île-de-France

La satisfaction est unanime : la production audiovisuelle et cinématographique en Île-de-France se porte bien, et donc crée de l’emploi, comme l’atteste la dernière étude d’Audiens*. Deux facteurs principaux sont mis en avant : des dispositifs fiscaux (crédit d’impôt et fonds de soutien de la région) qui fonctionnent bien et un savoir-faire réel. Mais si « on peut tout tourner en Île-de-France; la haute montagne, comme la mer », il convient de rester vigilants sur trois grands points : veiller à la pérennité des mesures fiscales, investir massivement dans la formation et avoir l’œil sur nos principaux concurrents que sont la Belgique, la Grande-Bretagne et le Canada. « Le secteur est très concurrentiel. Fonctionnalité et stabilité sont primordiales », avertit Pierre-Yves Bournazel, président de la Commission du Film d’Île-de-France.
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Pour la 12e année consécutive, Audiens présentait le mois dernier, par la voix de son président Patrick Bézier, directeur général, et Philippe Degardin, directeur des études & statistiques, les résultats de son « Observatoire de la production audiovisuelle et cinématographique en Île-de-France », mené conjointement avec la Commission du Film d’Île-de-France, représentée par son président, Pierre-Yves Bournazel, et Yann Marchet, directeur marketing.

 

Retour de la croissance en 2015

Après une année 2014 stable au niveau de la masse salariale, 2015 marque le retour de la croissance dans la région. Celle-ci porte principalement sur l’emploi permanent en CDI (+ 9 % en masse salariale et en effectifs). Malgré une masse salariale qui augmente, on observe une diminution du nombre de salariés intermittents sur la même période (117 068 CDD et CDDU en 2015, contre 120 393 en 2014). En Équivalent temps plein (ETP), la croissance est relativement stable en Île-de-France (+ 1 % avec près de 30 000 ETP).

En 2015, le nombre d’entreprises du secteur s’élevait à 8 400, dont 5 100 en Île-de-France, (+2% par rapport à 2014) réparties comme suit : 1 800 producteurs de films et de programmes pour la télévision, 1 240 producteurs de films institutionnels, 1 500 producteurs cinématographiques et 540 sociétés de postproduction. Toutes ces sociétés ne produisent pas chaque année, certaines ne voient le jour qu’à l’occasion d’un projet unique. Seul 1% de ces entreprises comptent plus de 50 employés à temps plein.

Le retour de la croissance en 2015 est principalement dû à la reprise des investissements dans le cinéma français (+ 28 %) et à la relocalisation en Île-de-France de films au budget supérieur à 10 M€ comme Chocolat de Roschdy Zem, grâce à l’effet conjugué du crédit d’impôt et du fonds de soutien de la Région Île-de-France, même si le taux de délocalisation reste important pour les tournages français (36 % de la production).

Côté tournages étrangers, l’activité marque le pas, certaines productions ayant été repoussées à début 2016, soit pour des contraintes d’organisation, soit pour bénéficier du relèvement de 20 % à 30 % du taux du crédit d’impôt international.

L’animation française, sur laquelle l’étude s’est plus particulièrement penchée cette année, poursuit son développement grâce notamment à l’accueil de productions internationales entièrement fabriquées en Île-de-France. Au-delà de l’exemple bien connu de Illumination Mac Guff, qui continue à voir croître le nombre de ses effectifs, une bonne dizaine de sociétés françaises comme Mikros Image, Cube Creative ou TeamTO, sont à même de produire régulièrement à l’international, « une question de survie pour beaucoup d’entre elles qui vont pouvoir se développer ici et ailleurs ».

La hausse de la production de séries TV n’est pas non plus étrangère à cette dynamique de croissance avec le tournage sur le territoire francilien de séries ambitieuses (Le bureau des légendes et Versailles) dont la récurrence a permis de renforcer l’activité des plateaux de tournage.

 

Bonnes perspectives 2016/2017

Au regard des cotisations, l’activité devrait être plus importante en 2016 qu’en 2015 (+ 5 %). Pour les entreprises situées en Île-de-France, le volume d’emploi des permanents augmente presque aussi fortement en 2016 (+ 4,9 %) qu’en 2015 (+ 5,7 %). En ce qui concerne les emplois intermittents, l’activité est plus cyclique et elle augmente quant à elle plus rapidement en 2016 (+ 5,8 %) qu’en 2015 (+ 3,6 %).

Un ensemble de facteurs permettent de prévoir une année 2016 exceptionnelle pour l’activité du secteur avec 5% de croissance prévue :

– relocalisation significative des tournages de films français et de la production audiovisuelle, notamment pour les productions à gros budget,

– des dépenses de productions étrangères multipliées par 3 grâce au passage de 20 % à 30 % du crédit d’impôt international (environ 150 M€),

– le retour des tournages étrangers en Île-de-France : le film indien Befikre (120 millions de spectateurs !), 50 Shades Freed, Jackie

Malgré un niveau d’activité déjà élevé, la croissance devrait se poursuivre en 2017 pour plusieurs raisons :

– la dynamique de relocalisation de tournages de films français à gros budget se confirme en 2017,

– l’évolution du crédit d’impôt international et les nouveaux dispositifs mis en place par le CNC pour relancer fortement l’industrie des effets visuels, qui a pour l’instant peu profité de la croissance de l’activité globale du secteur, mais qui peu à peu semble se relocaliser,

– l’activité internationale va se renforcer en région Île-de-France grâce à plusieurs longs métrages d’animation en cours de fabrication, mais aussi avec l’arrivée de productions hollywoodiennes intéressées à la fois par les décors iconiques et une fiscalité avantageuse, qui permettent à la France d’être compétitive face à ses principaux challengers. À Paris, on compte déjà une hausse de 15 % des tournages internationaux sur le 1er trimestre, et Mission Impossible 6 actuellement en tournage à Paris ne fera que conforter cette hausse, après une augmentation de 30 % sur toute l’année 2016.

 

Le regard des professionnels

Pour la première fois, Audiens avait fait venir à l’occasion de la présentation de son étude quelques professionnels pour une table ronde à bâtons rompus. Étaient présents : Jean-Yves Mirski, délégué général de la Ficam ; Anne Gourdon, DGA Quad Production ; Cyril Le Pesant, CEO, cofondateur de Knightworks, et François Pulliat, régisseur général, membre de l’AFR.

Si l’enthousiasme général était ici moins frappant, la foi dans l’avenir s’avère réelle. « Le bilan est effectivement positif grâce aux mesures favorables qui ont été prises, mais nous sommes inquiets sur leur pérennité. Nous sommes certes confiants, mais notre optimisme est raisonnable », a confié Jean-Yves Mirski. Lequel souligne le morcellement de l’industrie technique à l’heure où certains « arrivent simplement avec un Mac et un logiciel ».

L’inquiétude se fait ressentir également côté régisseurs. « Globalement, nous assistons à un retour sur la France de films que se tournaient ces dernières années à l’étranger, mais l’impact en termes sociaux est plus difficile à évaluer. Plus de films, plus d’argent mais… Il est vrai toutefois qu’une dizaine de personnes, sur la centaine de membres que compte notre association, travaille actuellement sur Mission Impossible 6, ce qui est encourageant », estime François Pulliat.

En matière d’aides et d’effets spéciaux, Anne Gourdon considère que « le territoire français devient compétitif. En cumulant l’essentiel des aides, nous sommes parvenus à réunir 45% du budget de Dans la brume qui s’est élevé à quelque 10 M€. Sur ce budget, nous avons investi 1 M€ sur les seuls effets spéciaux, ce qui est beaucoup puisque généralement celui-ci ne dépasse pas 2 à 3% du budget total d’un film ». Et d’ajouter « Ce ne seront pas quelques retouches qui feront revenir en France les spécialistes VFX. Ces derniers sont surtout attirés par de vrais projets qui les fassent rêver ».

Avis partagé par Cyril Le Pesant qui précise toutefois « qu’il sera difficile de s’aligner sur les rémunérations offertes notamment aux États-Unis », mais là n’est pas le seul moteur des ces expatriés particulièrement sensibles aux « projets qui voyagent ». Cyril Le Pesant, dont la société Knightworks s’est développé à l’international grâce aux aides et à son savoir-faire, poursuit : « Cela devient compliqué de recruter des talents. L’enjeu sur la formation est fort entre sociétés et pouvoirs publics ». À ce sujet, Jean-Yves Mirski regrette « le manque de dialogue entre écoles et entreprises. Beaucoup trop de jeunes partent encore à l’étranger. »

 

La conclusion des initiateurs de l’étude

Pour Pierre-Yves Bournazel, « avec un investissement de 16 M€ en 2016, le plus important jamais engagé, la région Île-de-France réaffirme, dans le cadre de sa politique de soutien à l’industrie du cinéma et de l’audiovisuel, sa volonté de stimuler la croissance d’un secteur clé innovant et dynamique, primordial pour assurer notre diversité culturelle, avec à la clé la création de nombreux emplois sur notre territoire. »

Pour Patrick Bézier, « au travers de cette analyse de données issues de sa base statistique, Audiens concrétise son rôle d’opérateur de référence en matière d’expertise sociale, au service des professions qu’il protège. Nous sommes plus que jamais aux côtés de ceux qui font rayonner la création française ».

 

* Le champ de l’étude. Réalisée par Philippe Degardin, directeur des études, Audiens, et Yann Marchet, directeur marketing à la Commission du Film d’Île-de-France, cette étude ne comprend que les entreprises participant et contribuant à l’activité de production audiovisuelle et cinématographique (production, prestation). Ont été exclues les activités de diffusion audiovisuelle, de distribution et d’exploitation cinématographique, ainsi que tous les services à la production (restauration, construction de décors, aménagement de plateaux, préparation de tournages extérieurs, services exceptionnels, etc.….) qui ne sont pas cotisantes au Groupe Audiens, mais qui prises en compte porteraient encore bien plus haut les retombées économiques pour le pays.

 

Pour aller plus loin, télécharger l’étude ici